Modéliser la transmission des prix dans les chaînes alimentaires pour anticiper l’inflation

Afin de mieux prévoir l’inflation, l’Insee travaille sur la modélisation de la transmission des prix, tout au long de la chaîne agroalimentaire française. Les premiers résultats sont présentés dans la note de conjoncture de juin 2023 : L’inflation reflue, la croissance hésite.

La note mesure la contribution des salaires et des intrants (ex. de l’énergie), fournis par un maillon ou par des opérateurs extérieurs à la filière, à la hausse des prix du maillon suivant. Elle apprécie aussi la contribution des stratégies d’adaptation des marges des acteurs, même si les auteurs émettent des réserves méthodologiques sur ce point. La modélisation a été réalisée pour les produits alimentaires, à l’exclusion des produits non transformés frais (poissons, fruits, légumes, etc.). La méthode employée diffère des précédentes par l’introduction des coûts énergétiques et de variables issues des enquêtes de conjoncture.

En 2022, les prix agricoles à la production (hors fruits et légumes) se sont accrus de 23 %. Les prix à la production des industries agroalimentaires ont augmenté de 16 % tandis que ceux à la consommation (produits alimentaires, hors produits frais) progressaient de 7 % (figure ci-dessous).

Évolution des prix le long de la chaîne de production alimentaire (2020-2023)Source : Insee
Lecture : le dernier point indiqué sur le graphique correspond aux valeurs pour avril 2023, sauf pour l’indice des prix à la consommation, disponible jusqu’en mai 2023. En avril 2023, l’indice des prix à la consommation des produits alimentaires (hors produits frais) a atteint 121,2 points, soit + 21,2 % par rapport à son niveau moyen de 2019 (base 100) ; en mars 2023, le cours des matières premières agricoles importées a augmenté de 59 % par rapport à la moyenne de 2019.

D’après cette étude, en 2022, le renchérissement des intrants extérieurs à la filière (matières premières agricoles importées, énergie, etc.) aurait contribué à ces hausses à hauteur de 90 % pour les prix agricoles à la production, de 70 % pour les prix des industries agroalimentaires et d’environ 50 % pour les prix à la consommation. Les coûts salariaux constitueraient le deuxième facteur le plus important pour chacun des maillons et seraient ainsi responsables de plus de 30 % de l’accroissement des prix au détail.

Ces travaux de modélisation permettent d’étudier la vitesse des transmissions. Ainsi, d’après les estimations, 50 % de la hausse des matières premières agricoles se répercutent sur les prix à la consommation au détail, au bout de trois trimestres, et 80 % au bout d’un an. Le reflux des matières agricoles et de l’énergie, amorcé à l’été 2022, aurait donc un effet à partir du second semestre 2023. Cependant, les variations de salaires et les comportements des acteurs économiques pourraient modifier ces prévisions. À terme, selon les auteurs, il sera intéressant d’observer l’impact d’évolutions législatives, telles la loi EGAlim, sur l’ampleur et les vitesses de transmission.

Amandine Hourt, Centre d’études et de prospective

Source : Insee

image_pdfimage_print