La concentration des firmes de l’agro-business aux États-Unis
Dans un rapport publié en juin 2023 par l’United States Department of Agriculture (USDA), des économistes analysent la concentration des firmes de l’agro-business. L’étude porte sur trois secteurs particulièrement concernés : l’industrie semencière, l’abattage-transformation de la viande et la distribution alimentaire.
Pour chacun de ces secteurs, les auteurs commencent par mettre en évidence les dynamiques de concentration. Ils s’appuient pour cela sur deux indicateurs : l’indice de concentration IC4, égal à la somme des parts de marché détenues par les quatre plus grosses entreprises du secteur étudié, et l’indice d’Herfindahl-Hirschmann (IHH), égal à la somme des carrés des parts de marché de l’ensemble des entreprises du secteur. Dans un deuxième temps, ils identifient les facteurs à l’origine de ces dynamiques de concentration. Enfin, ils étudient le traitement de ces situations par les politiques de régulation de la concurrence.
Aux États-Unis, la concentration dans l’industrie semencière a commencé dans le courant des années 1970. Alors que la sélection variétale relevait jusqu’alors presque exclusivement de la recherche publique, les entreprises privées gagnèrent peu à peu du terrain. Le développement des organismes génétiquement modifiés (OGM), et la possibilité de breveter les variétés et traits génétiques ainsi mis au point, ont permis ensuite aux quelques firmes en pointe sur ces techniques de construire puis de maintenir un quasi-monopole. En 2015, six firmes se partageaient l’essentiel du marché étasunien (et mondial), pour un IC4 compris entre 75 et 93 %, contre 47 à 88 % au début des années 2000. Depuis, plusieurs fusions et acquisitions ont encore réduit le nombre de firmes intervenant dans ce secteur, à l’instar du rachat de Monsanto par Bayer.
Les autorités de régulation (Commission fédérale du commerce et Division antitrust du département de la justice) ont scruté ces mouvements et souvent émis des réserves à leur égard. Celles-ci ont ensuite été systématiquement levées, parfois avant même qu’une décision ait été prise, moyennant la cession de quelques actifs par l’entreprise acquéreuse. Si cette concentration fait l’objet de débats fournis, quant à ses impacts, il apparait que le prix des semences aux États-Unis s’est accru de façon considérable depuis 2000 (figure ci-dessous). Plusieurs auteurs voient là une conséquence d’un manque de concurrence lié à la trop grande concentration du secteur.
Évolution du prix des semences et des cultures aux États-Unis (indice)
Source : USDA
À quelques nuances près, des dynamiques de concentration similaires, marquées notamment par un accroissement continu de l’indice IC4, sont attestées pour les deux autres secteurs étudiés (figure ci-dessous).
Évolution de l’indice IC4 dans le secteur de l’abattage et transformation de la viande aux États-Unis
Source : USDA
Mickaël Hugonnet, Centre d’études et de prospective
Source : USDA