Selon l’USDA, la concentration dans les marchés agricoles américains ne porte pas forcément préjudice aux producteurs

L’USDA a publié récemment un document explorant les conséquences théoriques et empiriques de la concentration des marchés agricoles américains. Les chiffres disponibles témoignent que différents niveaux (production, transformation, commerce) sont concernés, avec à des degrés divers une baisse du nombre d’acteurs d’importance. La part des quatre principales entreprises réalisant l’abattage des bovins engraissés est passée de 36% à 85% en trente ans et celle des vingt principaux distributeurs de 40% à 63% en vingt ans. Cette concentration résulte à la fois d’une diminution du nombre d’opérateurs mais aussi d’une segmentation accrue des marchés (plus étroits) pour répondre à une multiplication de demandes différenciées (bio, labels). Elle s’est accompagnée d’une évolution des modes de transaction et de fixation des prix : les marchés au comptant cèdent progressivement la place à l’intégration verticale et, surtout, à la contractualisation.

Commercialisation dans le secteur bovin : baisse des modalités de livraison au comptant (negociated cash et negociated grid) et progression des contrats (formula et forward contract)

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Source : USDA

En dépit des nombreuses craintes suscitées par un pouvoir de marché accru des transformateurs, la littérature disponible ne permet pas de conclure à une baisse du prix payé aux producteurs. Premièrement, les transformateurs utilisent la contractualisation avant tout pour sécuriser leur approvisionnement sur le moyen-long terme et n’ont donc pas intérêt à asphyxier leurs fournisseurs. Ensuite, la concentration permettrait des économies d’échelle sur les coûts, donc un meilleur résultat pour l’ensemble de la chaîne (y compris pour le producteur même si c’est le transformateur qui en bénéficiera le plus). Enfin, la contractualisation permet un meilleur partage du risque et un ajustement plus fin de la production à la demande.

Pour autant, la concentration accrue des marchés et ces nouveaux modes de transactions ne sont pas sans risques pour les producteurs (éviction des plus petits, dépendance à un seul débouché risqué, etc.), du point de vue des prix (volatilité, risque de manipulation de cours), mais aussi pour les pouvoirs publics. En effet, l’étroitesse des marchés et la multiplication des contrats rendent difficile le suivi des prix et nuisent à l’efficacité de certaines mesures de soutien (marketing assistance loan), comme à l’efficacité de la politique assurancielle américaine (asymétrie d’information, difficile mutualisation des risques). Toutefois, l’USDA ne recommande pas de lutter contre la contractualisation ou l’intégration, mais promeut plutôt la standardisation de certains éléments des contrats (contrats types) et l’amélioration de la collecte d’information sur les prix et les quantités.

Pierre Claquin, Centre d’études et de prospective

Source : USDA

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