L’agriculture en environnement contrôlé : viabilité économique et durabilité
L’agriculture en environnement contrôlé (AEC) désigne des systèmes de production végétale en espace clos – serres, fermes verticales (figure), etc. – dans lesquels les conditions de croissance des plantes (lumière, température, irrigation, etc.) sont maintenues artificiellement. Plusieurs bénéfices, par rapport à une agriculture conventionnelle de plein champ, sont avancés pour promouvoir ces systèmes : consommation réduite de terre et d’eau, productions alimentaires désaisonnalisées, en tout endroit du monde et non soumises aux aléas climatiques, etc. Pour autant, de nombreuses études font état des besoins considérables en énergie de l’AEC. Les difficultés financières récentes, voire les faillites, de plusieurs acteurs du secteur, consécutives à la hausse des prix de l’énergie, interrogent sur la viabilité économique de ce modèle d’agriculture.
Ferme verticale de cultures maraîchères
Source : Agronomy for Sustainable Development, crédits photo : Manon Airaud
Deux articles scientifiques publiés fin septembre 2025 analysent les performances productives, économiques et environnementales de différents types d’AEC, comparativement à l’agriculture de plein champ. Le premier, paru dans npj Sustainable Agriculture, présente une méta-analyse de 116 études couvrant 43 pays et 23 cultures. Il montre que l’efficacité énergétique de l’AEC (quantité d’énergie annuelle par kilogramme de produit récolté ou par mètre carré de surface cultivée), varie fortement selon le type d’installation (les serres sont nettement moins énergivores que les fermes verticales), les cultures (le soja et le maïs parmi les plus énergivores, à l’inverse du concombre) et le contexte climatique. Si les 15 principales cultures produites en AEC étaient exclusivement cultivées dans des fermes verticales, les auteurs estiment que la consommation énergétique totale des États-Unis augmenterait de 7 %, soit dix fois la consommation actuelle de l’ensemble des cultures de plein champ.
Dans la revue Agronomy for Sustainable Development, d’autres chercheurs comparent la production de laitue en plein champ avec celle obtenue dans différents systèmes d’AEC (serres peu mécanisées, serres hautement technologiques et fermes verticales). Les rendements et la productivité supérieurs des fermes verticales sont obtenus au prix d’une plus forte consommation énergétique : 0,08 à 0,13 kg de laitue produite par kWh en fermes verticales, contre 0,9 à 3,2 kg par kWh en plein champ. Les auteurs proposent une méthode, prenant en compte les émissions de GES relatives au transport dans des camions réfrigérés, pour calculer la distance au-delà de laquelle l’importation de la laitue cultivée en plein champ a un impact environnemental supérieur à celle produite localement dans une ferme verticale.
Jérôme Lerbourg, Centre d’études et de prospective
Sources : npj Sustainable Agriculture, Agronomy for Sustainable Development



