Le Conseil d’État s’intéresse à la politique publique de l’eau

« Les entretiens du Conseil d’État » (13 novembre 2024) étaient consacrés au financement et à la gouvernance de l’eau, à travers deux tables rondes. En ouverture, son vice-président a expliqué en quoi l’eau était « objet de droit et objet du droit », précisant le cadre réglementaire national et international. Citant le rapport public 2010 de son institution, il a souligné qu’avec le changement climatique, l’eau est tout à la fois de plus en plus une ressource et une menace.

L’introduction de la première table ronde a rappelé que ce sont principalement les usagers des services d’eau potable et d’assainissement qui financent la politique de l’eau (redevances et taxes indirectes). Viennent ensuite ceux qui prélèvent sur la ressource ou la polluent (ex : redevances pour pollutions industrielles ou diffuses) et le contribuable (ex : taxe sur la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations). Les comptes de l’environnement de 2015 estimaient les dépenses totales à 26,4 milliards d’euros, effectuées par les agences de l’eau, l’Office français de la biodiversité et le « bloc communal ». Dans un contexte où les besoins du « grand cycle de l’eau » vont croissants, on peut se demander si les deux principes fondamentaux (« l’eau paie l’eau » ; « le payeur doit être le préleveur ou le pollueur ») sont encore effectifs et suffisants.

Dans son exposé, la Cour des comptes est revenue sur les grandes recommandations de son rapport sur la gestion quantitative de l’eau de 2023 : mieux évaluer les effets du changement climatique sur la ressource, piloter la politique de l’eau au plus près des territoires, améliorer la connaissance de son coût et de son financement, réduire les prélèvements, etc. La récente réforme des redevances y a partiellement répondu : paysage fiscal plus lisible, plus grande responsabilité des préleveurs, mais rééquilibrage insuffisant du partage de l’effort au profit des ménages. De son côté, la direction de l’eau et de la biodiversité du ministère de la Transition écologique a confirmé que la contestation des mécanismes de financement du « grand cycle de l’eau », par les usagers des services d’eau potable et d’assainissement (80 % du rendement des redevances), restait prégnante. La demande du monde agricole, de maîtriser la fiscalité qui lui est appliquée, peut sembler paradoxale alors qu’il est bénéficiaire net de la caisse de solidarité des agences de l’eau entre les usagers (taux de retour moyen de 1,6, devant passer à 2,5 avec la mise en œuvre du Plan eau).

Karine Belna, Centre d’études et de prospective

Source : Conseil d’État

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