Évaluation de l’impact environnemental du déploiement de l’agriculture numérique

Un article paru en octobre 2024 dans le Journal of Industrial Ecology présente une méthode pour estimer l’empreinte carbone d’outils numériques agricoles déployés à l’échelle d’un territoire. L’approche repose sur une évaluation remontante (bottom-up) qui prend en compte les émissions de gaz à effet de serre (GES) générées lors de l’utilisation mais aussi de la fabrication des différents dispositifs numériques constituant le « système technologique » affecté à une tâche agricole donnée. Pour illustrer cette démarche, deux types de tâches ont été spécifiquement étudiés : l’identification des vaches laitières et la détection automatisée de leurs chaleurs ; le semis et le désherbage par des robots dans des exploitations en grandes cultures.
L’estimation de l’impact environnemental de l’adoption d’un outil numérique, sur un territoire, est réalisée en tenant compte du nombre d’exploitations présentes et de leurs tailles. Ceci permet de simuler plusieurs stratégies de déploiement ou de comparer différentes solutions numériques entre elles. Les auteurs ont testé l’adoption, à l’échelle du territoire français, de plusieurs dispositifs d’agriculture numérique différant par leur complexité technologique, pour les deux ensembles de tâches retenus. Les émissions de GES des systèmes robotiques de semis et de désherbage (jusqu’à 317 kt de CO2 par an pour la France entière) sont nettement supérieures à celles estimées pour le premier cas d’étude (figure), en raison du coût environnemental élevé de leur fabrication et du nombre supérieur d’exploitations concernées.

Simulation de l’empreinte carbone de 4 systèmes technologiques déployés à l’échelle des exploitations laitières françaises pour l’identification des vaches et la détection automatisée de leurs chaleursSource : Journal of Industrial Ecology
Lecture : les graphiques (a) et (b) représentent respectivement la consommation électrique et les GES émis à la fabrication et lors de l’utilisation de différents systèmes technologiques : du plus simple (SSRFID) avec ordinateur portable, puces RFID, lecteur RFID, au plus élaboré (SSPC) avec ordinateur portable équipé d’un processeur graphique (GPU), puces RFID, lecteur RFID, caméra connectée à un module de vision par ordinateur (Jetson Nano). Ces estimations sont calculées pour une année sur l’ensemble des exploitations laitières françaises.

Par ailleurs, contrairement au premier cas d’étude (vaches laitières), l’impact environnemental des systèmes robotiques n’augmente en général pas avec leur niveau de complexité technologique. Ainsi, le robot de complexité intermédiaire s’avère être le moins polluant, à l’échelle nationale, en raison d’un meilleur compromis entre le coût environnemental de sa fabrication, sa consommation d’énergie et sa capacité de traitement (qui conditionne le nombre total de robots déployés dans les exploitations françaises de grandes cultures).

Jérôme Lerbourg, Centre d’études et de prospective

Source : Journal of Industrial Ecology

 

 

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