Le recours aux travailleurs immigrés dans l’agriculture italienne
La première partie de cet article, publié en juin 2024 dans la revue Sustainability, étudie les statistiques disponibles et fait le lien entre les évolutions structurelles de l’emploi agricole en Italie et le recours croissant à une main-d’œuvre immigrée. Comme dans les autres pays de l’OCDE, l’emploi agricole salarié s’est progressivement et partiellement substitué au travail familial. En 2020, il représentait 47 % des actifs agricoles et 32 % des équivalents temps plein, contre respectivement 24,2 % et 29,9 % en 2010. Ces emplois se caractérisent par une précarité importante : travail non déclaré fréquent, faibles qualifications et rémunérations, contrats courts, etc. Cela est particulièrement vrai dans les régions du sud de l’Italie, où les opportunités d’emploi (agricole ou non) sont plus limitées qu’au nord (figure). Pour les auteurs, ces conditions précaires de l’emploi agricole restreignent son attractivité et expliquent le recours à une main-d’œuvre largement immigrée, dont le pouvoir de négociation est limité.
Salaire horaire moyen et taux de travail non déclaré en agriculture, dans différentes régions italiennesSource : Sustainability
La seconde partie de l’article s’intéresse aux initiatives développées pour limiter l’exploitation de la main-d’œuvre agricole immigrée. Les auteurs citent notamment la certification Quality agricultural work network, créée en 2014, dont peuvent bénéficier les entreprises agricoles répondant à certains critères : absence de condamnations pour des infractions à la législation du travail, paiement des cotisations sociales, application des conventions collectives en vigueur. Cette certification, qui fait figure de référence au niveau européen, permet d’obtenir plus facilement certaines aides publiques, et les exploitations détentrices sont moins susceptibles que les autres d’être contrôlées. Cependant, aucune évaluation des effets de ce dispositif n’a été menée jusqu’à présent.
Pour terminer, les auteurs ont étudié la perception qu’ont les agriculteurs italiens des travailleurs étrangers, au moyen d’entretiens avec seize chefs d’exploitation. La plupart des enquêtés considèrent cette force de travail comme essentielle au maintien de leur activité, mais ils ne souhaitent pas investir dans sa formation, considérant que ces personnes ne sont pas appelées à rester durablement sur leur exploitation.
Mickaël Hugonnet, Centre d’études et de prospective
Source : Sustainability