Halles à marée : les gros acheteurs de poissons peu sensibles aux prix
Dans un article paru dans Fisheries Research en juin 2024, trois chercheurs du Laboratoire d’économie et de management Nantes-Atlantique mesurent la sensibilité au prix des acheteurs de poissons, sur le marché de la première vente, dans les 35 halles à marée de France. L’étude utilise les données du réseau inter-criées (RIC) qui a enregistré, en 2021 et 2022, plus de 11,7 millions de transactions, passées principalement aux enchères, ou de gré à gré (5,6 % des transactions). Ces données recensent la date et la valeur de la vente, l’espèce de poisson, sa taille, etc. Elles identifient les vendeurs, les navires et les acheteurs, qui peuvent être grossistes, acteurs de la première transformation, poissonneries, chaînes de supermarchés, restaurateurs, etc.
Dans un premier temps, les auteurs classent les acheteurs selon leurs caractéristiques et leurs pratiques, telles le nombre de transactions et de halles visitées, le nombre d’espèces achetées. Ils aboutissent à huit groupes différents (figure). Par exemple, le premier groupe, qui représente 2,9 % des acheteurs, est à l’origine de 25,8 % des transactions, pour 36,3 % des volumes totaux achetés (37,7 % en valeur). Il s’agit principalement de grossistes, de conserveries ou d’usines de transformation. À l’autre bout du spectre, le groupe 8 rassemble des acheteurs occasionnels, qui ne réalisent que 3,3 % des transactions pour 0,9 % des volumes totaux (1 % en valeur).
Caractérisation des groupes d’acheteursSource : Fisheries Research, d’après calculs des auteurs sur les données RIC 2021-2022
Ensuite, pour chacun des groupes constitués, les auteurs calculent l’élasticité-prix, soit la variation de la quantité achetée face à une évolution de prix. Dans l’ensemble, la sensibilité au prix est faible, en particulier pour les deux premiers groupes d’acheteurs (principalement composés de grossistes, de conserveries et d’usines de transformation). Partant de ce résultat, les scientifiques estiment que ces acteurs sont plus préoccupés par leur approvisionnement régulier en matières premières que par le prix qu’ils paient. Cela laisse supposer que ces acheteurs de la première vente sont en mesure de répercuter une potentielle augmentation des prix sur leurs propres clients.
Amandine Hourt, Centre d’études et de prospective
Source : Fisheries Research