Mise en perspective de la proposition de réglementation européenne sur les NTG
Dans un policy paper de la fondation Robert Schuman diffusé en septembre 2023, Agnès Ricroch, enseignante-chercheuse en génétique et amélioration des plantes (AgroParisTech), met en perspective la proposition de réglementation européenne faite en juillet 2023 sur les nouvelles techniques génomiques (NTG), à la lumière du progrès scientifique et du cadre réglementaire international.
Différents procédés de sélection végétale (croisement conventionnel, mutagénèse aléatoire, transgénèse, etc.) permettent de créer de nouvelles variétés aux caractéristiques améliorées : plus haut rendement, résistance accrue aux maladies et aux stress abiotiques, etc. Parmi eux, les NTG apportent des modifications prédéterminées à des endroits ciblés du génome. Au cœur de nombreuses recherches, elles se sont diffusées grâce à la technique CRISPR-Cas, pour laquelle plus de 11 000 brevets ont déjà été déposés, dans le monde, depuis sa découverte en 2012. Certains couvrent la modification d’une séquence génétique d’un caractère donné chez une espèce donnée.
La plupart des pays réglementant ces techniques distinguent les organismes génétiquement modifiés (OGM) obtenus par transgénèse, des plantes issues des NTG, dès lors qu’aucun gène étranger à l’organisme n’a été inséré. En Europe, la Cour de justice a décidé en 2018 que les NTG devaient être considérées comme des OGM au regard de la directive de 2001 qui les réglemente. En juillet 2023, la Commission a proposé une adaptation du cadre réglementaire à ces nouvelles techniques. Deux catégories de plantes y seraient distinguées. Dans la première, les plantes comportent un maximum de 20 modifications génétiques, qui auraient pu se produire naturellement ou par croisements traditionnels. Elles seraient alors considérées comme des cultures conventionnelles, autorisées à être produites sans obligation de traçabilité, ni d’étiquetage. Elles resteraient cependant interdites en agriculture biologique et les semences de ces variétés devraient être déclarées dans une base d’informations publique. La deuxième catégorie regrouperait les plantes n’entrant pas dans la première catégorie, considérées alors comme des OGM et soumises à la directive de 2001.
L’auteure, favorable à cet assouplissement des règles en faveur des NTG, regrette cependant que cette proposition réglementaire se base sur les seuls critères techniques et non sur les caractéristiques de la variété finale obtenue. Elle mentionne l’exemple du Canada où, à la différence du cas européen, une évaluation est prévue uniquement dans le cas d’obtention de caractéristiques non encore observées.
Jérôme Lerbourg, Centre d’études et de prospective
Source : Fondation Robert Schuman