Un rapport du Conseil d’État sur la place du long terme dans l’action publique
L’étude annuelle du Conseil d’État, titrée Inscrire l’action publique dans le temps long, vient clore un cycle de trois années portant sur trois dimensions de l’action publique : l’usager (2023), la souveraineté (2024) et le temps (2025). D’après les auteurs, l’action publique, souvent soumise à l’urgence des crises, devrait s’inscrire davantage dans le long terme et anticiper les grandes tendances. Vingt propositions, en trois axes, sont avancées pour lui redonner sa place dans l’action publique.
Le premier axe consiste à développer une vision du temps long partagée par l’ensemble des acteurs de la vie démocratique : Parlement, exécutif, pouvoir juridique, partenaires sociaux, citoyens, Union européenne, etc. Le Parlement pourrait se doter d’organes dédiés à cette perspective et renforcer son activité d’évaluation des politiques publiques. Il pourrait fixer les orientations générales de l’action publique et les matérialiser à travers des documents stratégiques (« livres tricolores »), élaborés conjointement avec l’exécutif et discutés avec la société civile, selon une planification pluriannuelle (figure). Le Gouvernement est, lui, encouragé à débattre des questions de long terme en conseil des ministres. La loi de programmation pluriannuelle des finances publiques, votée en début de législature, tiendrait compte de ces « livres » et fixerait un cadre pour les lois de finance annuelles à venir. Les auteurs proposent que le Haut-commissariat à la stratégie et au plan (HCSP) réalise régulièrement des exercices de prospective décennaux.
Proposition de prise en compte des enjeux du temps long dans les processus démocratiques
Source : Conseil d’État
La deuxième priorité serait de fonder les réflexions de long terme sur le savoir scientifique et l’expertise. À tous les niveaux, la population, les administrations et les décideurs publics devraient être sensibilisés aux travaux et résultats de la science. Le recours à la prospective devrait être favorisé : acculturation à la démarche, mobilisation d’experts (ex. HCSP, think tanks), recours aux travaux d’anticipation dans les administrations, etc. Les auteurs encouragent chaque ministère à réaliser régulièrement une étude prospective.
Enfin, le dernier axe concerne l’efficacité de la mise en œuvre de l’action publique dans le temps long. Le Conseil d’État suggère de mieux coordonner les orientations stratégiques, d’évaluer régulièrement les résultats des politiques et de les adapter si nécessaire. Les auteurs appellent aussi, entre autres, à valoriser et à renforcer les compétences en prospective des agents et des structures publiques.
Franck Bourdy, Centre d’études et de prospective
Source : Conseil d’État



