Les « légumes de la mer » : innovations et défis

Plusieurs publications parues entre mars et mai 2024 traitent des filières, productions et marchés des algues. Le secrétariat d’État à la mer leur a par ailleurs récemment consacré une feuille de route.

Selon un rapport de la CNUCED, le marché des algues a triplé en valeur depuis 2000, passant de 5 à 17 milliards de dollars en 2021. La Chine demeure le premier producteur mondial, mais la valeur du produit tend à y décroitre, favorisant d’autres champions régionaux comme l’Indonésie, la Corée du Sud et les Philippines.  À ce jour, les marchés intérieurs forment l’essentiel des débouchés et sont les plus rémunérateurs. Seuls 14 % de la valeur globale du marché sont liés aux exportations, pour un montant total de 943 millions de dollars. Si l’Asie est la première région importatrice, les États-Unis, l’Europe (dont la France), la Russie et l’Australie montrent un intérêt croissant pour ces produits.

À côté de leur capacité de séquestration du carbone et de leur contribution à la diminution des émissions de méthane (lorsqu’elles sont introduites dans l’alimentation animale), les algues présentent plusieurs avantages pour la production de matériaux plastiques. Comme le rappellent A. Dino et ses collègues, des microalgues comme la spiruline sont capables, à certaines conditions, de produire des polymères (figure) associant une bonne résistance et une biodégradabilité supérieure aux plastiques traditionnels. De plus, à la différence des bioplastiques issus de la canne à sucre ou du blé, les algues ne mettent pas en concurrence production alimentaire et fabrication de matériaux durables.

Les micro-algues dans différentes conditions de culture et leur rendement en polymèresSource : Discover environnement
Lecture : le tableau montre les différentes conditions de culture des micro-algues et leurs impacts sur la variation du rendement en polymère biodégradable, qui entre dans la composition de plastiques durables.

L’introduction d’ingrédients algaux dans les denrées, afin de renforcer leur contenu protéiné, a également été étudiée. Le chercheur indien O. Bhatnagar et ses coauteurs rappellent ainsi la teneur en protéines de certaines algues (jusqu’à 60 % contre 43 % pour la viande et 26 % pour le lait), une caractéristique prometteuse dans la lutte contre la malnutrition. De plus, mélangées à la farine lors de la production du pain, certaines algues renforcent son goût et sa teneur en calcium comme en magnésium. Cependant, l’usage de tels ingrédients comporte aussi des inconvénients, comme l’apparition de pigments verts qui appellent des travaux de R&D complémentaires. V. Doumeizel souligne enfin, sur RFI, l’intérêt de productions en Afrique australe et dans l’océan indien (figure). Il cite une startup namibienne produisant des biostimulants ou encore la capacité de l’algoculture malgache à tirer des enseignements de l’expérience tanzanienne.

L’exportation d’algues à Zanzibar, en valeur et en volume
Source : CNUCED

Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective

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