Un dossier spécial de la Revue de l’OFCE sur le volet agricole du Pacte vert
Faisant suite à la conférence-débat sur les aspects agricoles du Pacte vert, organisée en janvier 2023 par l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), ce dossier publié en avril 2024 rassemble quatre contributions éclairant différents enjeux de souveraineté et de durabilité de l’agriculture.
Thierry Pouch et Marine Raffray (Chambres d’agriculture France) reviennent sur le concept de « souveraineté alimentaire » et sur l’évolution historique de cette notion. Hervé Guyomard, Louis-Georges Soler et Cécile Détang-Dessendre (INRAE) analysent ensuite les mécanismes à l’œuvre pour chacun des trois leviers prévus par le Pacte vert en matière agroalimentaire : la transition agro-écologique de la production agricole, la réduction des pertes et gaspillages le long de la chaîne de valeur, l’adoption de régimes « sains et durables ». Ils estiment, avec un modèle d’équilibre partiel, les impacts marchands et non marchands de leur mise en œuvre (séparée puis concomitante), par rapport à la situation de référence, correspondant à la moyenne 2018-2020. Deux difficultés sont alors repérées pour appliquer les mesures découlant du Pacte vert : premièrement, les conséquences économiques pour les filières animales doivent être bien prises en compte par les pouvoirs publics ; ensuite, la transformation souhaitable des comportements alimentaires est assez éloignée des tendances réellement observées.
L’évolution des filières animales est également au cœur de la contribution de Sandrine Levasseur (OFCE). Alors que l’agriculture, et plus particulièrement l’élevage, est la principale source de méthane et d’oxyde nitreux (figure), elle analyse les conditions d’atteinte de l’objectif de réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur agricole, d’ici 2030 (par rapport au niveau de 1990). Elle estime qu’une baisse drastique (22 %) du cheptel bovin européen est une solution difficile à faire accepter aux éleveurs, et interroge alors des alternatives technologiques reposant sur l’agriculture de précision. Cette dernière n’est optimale que dans le cas des systèmes intensifs, avec des animaux en stabulation (y compris semi-ouverte), et la dégradation du bien-être animal qui pourrait en résulter serait alors à prendre en compte.
Émissions de GES du secteur agricole versus l’ensemble de l’économie en 2021 dans l’Union européenne, ramenées en équivalent CO2Source : Revue de l’OFCE
Le dernier article, de Jacques Le Cacheux, livre une synthèse des enjeux économiques, environnementaux, sanitaires et sociaux du système agroalimentaire européen, et des politiques publiques afférentes. Le dossier se conclut donc sur le constat que l’ambition de transition portée par le Pacte vert se traduit difficilement, jusqu’à présent, dans les moyens et politiques proposés.
Muriel Mahé, Centre d’études et de prospective
Source : Revue de l’OFCE