Les réglementations nationales peuvent restreindre le cumul des aides au démarrage des exploitations

Dans un article récent, des juristes néerlandais de l’université de Wageningen reviennent sur une décision préjudicielle de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), de 2021, portant sur l’attribution des aides à l’installation dans le cadre de la Politique agricole commune (PAC).

La CJUE a été saisie par la justice lettone d’une demande de clarification du droit européen (renvoi préjudiciel), sur la possibilité de cumuler des aides au développement des petites exploitations et des aides à l’installation au titre des jeunes agriculteurs (article 19 du règlement 1305/2013). Les auteurs questionnent deux dimensions de l’arrêt : la définition de « jeune agriculteur » et le degré de liberté des États membres pour définir les modalités d’application en matière d’aide au démarrage.

Une jeune agricultrice lettonne avait, en 2016, demandé à bénéficier de l’aide au développement des petites exploitations, la ferme reprise ne remplissant pas les critères de taille économique pour les aides à l’installation. Or, quelques mois plus tard, reprenant en plus l’exploitation familiale, elle dépassait les seuils lui ouvrant cette possibilité. L’administration lui avait donc refusé ces aides, arguant du fait qu’elles n’étaient pas cumulables et qu’elle avait perdu son statut de primo-installée en demandant précédemment une aide au développement.

Les chercheurs mettent en évidence le dissensus apparu entre l’avocat général et le juge en matière de cumul des aides. Pour le premier, l’esprit de la PAC vise d’abord à favoriser le renouvellement des chefs d’exploitation et, par conséquent, restreindre l’accès à l’aide à l’installation est contraire à l’objectif recherché. Les États membres ne devraient donc pas adopter de contraintes supérieures à celles déjà incluses dans le règlement. Pour le second, à l’inverse, si rien n’interdit le cumul des aides, dès lors que les montants maximaux prévus ne sont pas dépassés, les États peuvent retenir des conditions d’attribution plus restrictives. En revanche, les deux confirment le statut de « jeune agricultrice » de la demanderesse, valable durant 24 mois après l’installation.

En conclusion, en confirmant la liberté d’appréciation des États membres en matière d’aides à l’installation, cet arrêt pourrait en réduire le recours, particulièrement pour les femmes, alors même que le renouvellement des actifs est une priorité de la nouvelle PAC.

Muriel Mahé, Centre d’études et de prospective

Source : Review of European, Comparative & International Environmental Law

 

 

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