Alternatives Économiques, hors-série n°101, « Mondialisation & Démondialisation »

Pour son 101e hors-série intitulé « Mondialisation & Démondialisation », le magazine Alternatives Économiques donne la parole à une vingtaine de chercheurs, experts, journalistes et personnalités du monde économique et politique pour réaliser un état des lieux de la mondialisation et envisager ses évolutions futures.

Selon les auteurs, bien que ce processus soit largement discuté depuis plusieurs décennies, évoquer la mondialisation est une tâche qui reste délicate du fait du manque d’informations. La mondialisation serait donc avant tout opaque, aucune institution n’étant réellement en mesure d’en comptabiliser l’ampleur au niveau des échanges économiques et marchands. Le débat, par articles interposés, entre Pascal Lamy (ancien directeur général de l’OMC) et Henri de Bodinat montre que les échanges de biens peuvent être surestimés et les interdépendances entre pays sous-estimées par les différentes sources statistiques. Aucune modalité de mesure de la mondialisation des échanges ne semble satisfaisante et chiffrer ce processus devient un enjeu.

Ce numéro dresse en outre le portrait d’un monde très inégalement mondialisé. Si les transactions annuelles sur les marchés des changes représentent 18,5 fois le PIB mondial, seuls 3% de la population mondiale résident en dehors de leurs pays d’origine. Même si Philippe Norel rappelle qu’il s’agit d’une lame de fond historique, il existe des degrés de mondialisation variables pour les différentes composantes du monde, « l’hypermondialisation » d’un domaine n’entraînant pas mécaniquement la mondialisation d’un autre (article de Dani Rodrik). Plus généralement, le processus de mondialisation tendrait à accentuer les écarts de compétences, de qualifications, d’accès à l’information et même de temporalités entre les différents acteurs de la planète. L’accentuation des inégalités entraînerait l’accroissement de la dépendance des acteurs les moins dotés vis-à-vis de ceux qui possèdent les capitaux qui leur font défaut.

La pertinence du terme même de « mondialisation » est questionnée (article de Jean-François Bayart). Ce processus étant « hétérogène » et « disjoint », la diffusion de produits ou de marques n’entraîne pas nécessairement une homogénéisation des pratiques. En effet, le temps des changements culturels et des évolutions des pratiques est bien plus lent que celui de la diffusion des informations, et il ne serait que faiblement accéléré par la mondialisation actuelle. L’homogénéisation culturelle, souvent imputée à la mondialisation, est donc questionnée et l’importance des hybridations soulignée.

Josselin Crozier, Centre d’études et de prospective

Lien : Alternatives économiques

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