Évolutions et défis de l’agriculture brésilienne
Après un premier article publié dans Géoconfluences, consacré à la puissance et à la dualité de l’agriculture brésilienne (voir un précédent billet), les géographes H. Théry et M.-F. Fleury viennent d’en publier un deuxième sur les évolutions et les défis qu’elle rencontre. L’agriculture brésilienne est particulièrement réactive aux marchés mondiaux, capable de rapides réorientations productives et de déplacements majeurs des zones de production. Elle se caractérise par des fronts pionniers toujours actifs, reposant encore en partie sur la déforestation et le développement d’infrastructures de transport. Ces espaces obtenus par déforestation sont aujourd’hui complétés par des terres libérées par l’intensification de l’élevage et l’augmentation du chargement animal.
L’ensemble de ces terres a permis l’essor de cultures destinées aux marchés mondiaux, en particulier le coton, le maïs et le soja. Le Brésil est devenu le deuxième producteur mondial de soja (il n’en produisait quasiment pas en 1970) et le premier exportateur de tourteaux. Le développement de ces cultures arables s’est accompagné d’une relocalisation vers le nord et l’ouest du pays (figure), suivant le déplacement du cheptel bovin vers les régions pionnières du centre-ouest et du nord, en direction de l’Amazonie.
Croissance et relocalisation des cultures commerciales au Brésil
Source : Géoconfluences
Alors que l’agriculture et l’élevage occupent encore moins de la moitié de l’immense territoire brésilien, la question agraire et les inégalités d’accès à la terre sont une source de tensions majeures. Elles semblent s’accroitre avec plus de 1 000 conflits ruraux recensés sur la première moitié de l’année 2023 (+ 8 %) et des assassinats pour des questions foncières.
La réponse à la demande des marchés mondiaux repose aussi sur un usage intensif des intrants et des ressources naturelles, au détriment des écosystèmes. Face à de tels enjeux de durabilité, les auteurs s’interrogent sur la capacité de l’agriculture brésilienne, si réactive, à se réinventer en permettant aux exploitations familiales de prendre leur part au développement.
Jean-Noël Depeyrot, Centre d’études et de prospective
Source : Géoconfluences