Impacts de l’agriculture sur la biodiversité
L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) a publié en octobre 2024 un rapport sur les interactions, positives et négatives, entre agriculture et biodiversité (figure). Il se fonde sur une revue de littérature, une synthèse de données et des modèles d’évaluation intégrée.
Relations positives et négatives entre conservation de la nature et agriculture
Source : UICN
Sur 163 040 espèces animales et végétales considérées, 34 % sont directement menacées d’extinction par l’agriculture, en raison de la conversion des habitats naturels en terres cultivées, pâturages, plantations et zones d’irrigation. Le secteur agricole constitue aussi une menace indirecte (espèces invasives, fertilisation, érosion des sols, produits phytosanitaires, etc.). Au cours des 30 dernières années, le risque d’extinction imputable au secteur agricole a progressé de plus de 1 %, soit plus que les autres facteurs étudiés (ex. récoltes illégales de bois). Toutefois l’agriculture pourrait, en modifiant ses pratiques, contribuer de façon significative à la réduction du risque d’extinction de la biodiversité selon l’UICN.
Pour concilier production agricole et préservation de la biodiversité, le rapport préconise des stratégies géographiquement différenciées. Dans les régions arides et du nord de l’hémisphère sud, qui abritent de nombreuses espèces pouvant cohabiter avec l’agriculture, les pratiques devraient être plus respectueuses de la biodiversité (land sharing). À l’inverse, en Europe, Amérique du Nord et dans les continents tropicaux, qui abritent davantage d’espèces menacées par l’agriculture, l’intensification de la production serait plus efficace afin de libérer des espaces pour la biodiversité (land sparing) (figure).
Proportion et localisation des espaces agricoles selon qu’ils représentent une menace ou un habitat pour les espèces naturellesSource : UICN
Lecture : la carte B représente la relation entre l’agriculture et les espèces pour lesquelles cette interaction est documentée, selon que l’agriculture constitue pour elles un habitat (vert) et/ou une menace (rouge), résultats pondérés par la taille de l’aire de répartition de l’espèce.
Ces stratégies devraient s’accompagner d’incitations (ex. paiements pour services environnementaux) et être envisagées préférentiellement à l’échelle infranationale. En effet, les solutions de préservation de la biodiversité ne peuvent être génériques et elles doivent s’adapter aux spécificités locales, aux échelles d’action et aux systèmes de production. D’autres recommandations concernent la réduction du gaspillage alimentaire, la végétalisation de l’alimentation, la réorientation des subventions dommageables à la biodiversité et l’intégration de clauses sur la durabilité de l’agriculture dans les accords commerciaux.
Marie Martinez, Centre d’études et de prospective
Source : Union internationale pour la conservation de la nature (UICN)