Maroc : impacts de la sécheresse sur le marché du travail agricole
Un article publié en janvier dans la revue European Review of Agricultural Economics mesure les impacts, à court et moyen termes, des épisodes de sécheresse importante sur les déplacements de main-d’œuvre agricole entre secteurs économiques au Maroc. Il s’agit également de voir comment les catastrophes climatiques déstabilisent durablement le marché du travail (au sens du facteur de production, qui englobe les activités informelles, au-delà du marché de l’emploi au sens strict).
L’équipe de chercheurs italiens a disposé de données individuelles, issues de l’enquête nationale sur l’emploi. Les auteurs ont dû se concentrer sur la période 2000-2009, en raison de l’absence d’indicateurs territoriaux dans les données postérieures à 2010, rendant impossible la comparaison entre provinces affectées ou non par la sécheresse.
L’évaluation a été conduite en comparant l’évolution de la répartition de la main-d’œuvre entre secteurs, pour des provinces touchées ou non par la sécheresse. Cette dernière est mesurée à partir des données météorologiques mensuelles.
Selon les auteurs, les impacts dépendent de la sévérité de l’épisode de sècheresse (ampleur et durée). En moyenne, la baisse de la part de travail en agriculture est de 4,3 points de pourcentage. De plus, l’impact négatif sur le travail agricole persiste pendant environ cinq années. Les actifs agricoles affectés par la sècheresse se reportent difficilement vers les autres secteurs, ce qui se traduit par une hausse du chômage. Ainsi, 39 % des travailleurs ayant quitté l’agriculture restent sans emploi durant la période d’observation. Les auteurs ont analysé les différences selon l’âge, le genre, le niveau d’éducation ou la modalité de travail (formelle/informelle). Si le niveau de diplôme ne semble pas significatif, être employé dans un cadre informel, et dans une moindre mesure être une femme ou un jeune amplifient l’impact négatif de la sécheresse.
En conclusion, les auteurs alertent sur le risque social lié à une hausse des inégalités de travail dans un contexte de changement climatique de plus en plus prégnant.
Muriel Mahé, Centre d’études et de prospective