Nikita Harwich, Histoire du chocolat, Paris, Éditions Desjonquères, septembre 2023, 328 pages
Chères lectrices et chers lecteurs, vous aimerez manger des chocolats à Noël et cet excellent livre fera un beau cadeau sous le sapin ! Écrit par Nikita Harwich, professeur à l’université Paris-Nanterre, il retrace la longue saga du cacao, depuis les Olmèques, les Mayas et les Aztèques jusqu’aux industries alimentaires et à la consommation de masse d’aujourd’hui. Très documenté, précis, puisant aux meilleures sources, l’ensemble se lit avec plaisir et apporte une multitude d’informations historiques, géographiques, économiques, mais aussi politiques ou médicales. Ne pouvant résumer une telle somme, on se contentera ici d’en donner quelques aperçus.
L’histoire du chocolat raconte celle de la mondialisation. À partir de son berceau naturel (Haut-Orénoque et bassin amazonien), le cacaoyer se diffusa aux Costa Rica, Nicaragua, Mexique et Équateur. Les premières fèves furent ramenées en Espagne en 1528, puis en Italie (1606) et en France à la cour de Louis XIII (1615). Des cargaisons joignirent plus tard Londres, Amsterdam, Bruxelles (1697) et c’est à bord de navires hollandais que le cacao arriva pour la première fois en Amérique du Nord. Sa consommation se diffusa tout au long du XVIIIe siècle, facilitée par des innovations techniques et l’évolution des goûts, mais elle restait élitiste. Il fallut attendre l’industrialisation du XIXe siècle et de la première moitié du XXe pour voir se multiplier les produits (tablettes, poudre, boules, rouleaux, bonbons), les recettes, les consommateurs et les occasions de consommer.
Aujourd’hui, un peu moins de 5 millions de tonnes de cacao sont produites dans le monde. La Côte d’Ivoire arrive en tête (43 %), suivie du Ghana (20 %), de l’Équateur (7 %), du Cameroun (6 %) et du Nigéria (6 %). L’appareil industriel s’est concentré, cinq multinationales couvrent 50 % du marché mondial et 70 % du marché européen, mais de nombreux fabricants plus petits se sont spécialisés dans les produits plus qualitatifs voire « haut de gamme ». Du côté de la demande, la consommation de produits chocolatiers par habitant et par an est actuellement de 10,8 kg en Suisse, 10,1 kg au Royaume-Uni, 7 kg en France, 2,6 kg aux États-Unis, 2 kg au Japon et seulement d’un peu plus de 100 g en Chine.
Au fil des siècles, le chocolat a suscité de nombreuses méfiances, accusé d’être une drogue ou un poison violent, de créer un « désordre des sens », d’entretenir l’acné juvénile, de favoriser le cholestérol, de déclencher des migraines. On l’a aussi paré de nombreuses vertus : purgatif, baume cicatrisant, remède aux morsures de serpent, aphrodisiaque, etc. Contrairement aux idées reçues, on sait maintenant que ses tannins inhibent le développement de la plaque dentaire et, qu’étant riche en fluor, il a une action anti-carie. Aliment complet contenant à la fois des glucides, lipides et protéines, mais aussi des minéraux (potassium, magnésium, phosphore) et des vitamines (A1, B1, B2), il recèle des substances aux propriétés stimulantes et antidépressives : théobromine, caféine, sérotonine, phényléthylamine, tyramine. Vous reprendrez donc bien un petit chocolat !
Bruno Hérault, Centre d’études et de prospective
Lien : Éditions Desjonquères