La relation entre diversification des cultures et performances économiques et agronomiques au Vietnam

Un article publié dans Ecological Economics en septembre 2023 s’intéresse à la relation entre la diversification des cultures et les performances agronomiques et économiques, dans trois provinces du centre du Vietnam : Gia Lai, Đắk Lắk et Đắk Nông. Ces provinces ont connu, depuis 1980, trois vagues de plantations de cultures de rente (figure ci-dessous) : le café robusta d’abord, puis le poivre et enfin les arbres fruitiers (avocat, durian, macadamia). Ces deux dernières cultures ont d’abord été développées sur les parcelles de café, en inter-rang (cultures intercalaires).

Vagues d’expansion des cultures de café, de poivre et d’arbres fruitiers
Source : Ecological Economics

Cette diversification, soutenue par les pouvoirs publics, visait à prémunir les producteurs vietnamiens des fluctuations des cours mondiaux du robusta. Actuellement, près de la moitié des surfaces caféières accueille d’autres productions. Au terme d’une enquête menée auprès de 234 agriculteurs, les auteurs définissent six catégories de parcelles, en fonction de la dominance du café, du poivre ou des arbres fruitiers (figure ci-dessous).

Diagramme des mélanges de cultures en fonction de la dominance relative du café, du poivre et des arbres fruitiersSource : Ecological Economics
Lecture : ce diagramme permet de classer les parcelles selon la dominance relative du café, du poivre et des arbres fruitiers. Pour cela, les auteurs ont tout d’abord calculé, pour chaque culture, un ratio d’équivalence de densité (Density Equivalent Ratio). Il représente le ratio entre la densité d’une culture sur une parcelle et la densité standard de cette même culture en monoculture. Ils ont ensuite rapporté ce ratio à l’échelle de la parcelle, en sommant les ratios d’équivalence de densité pour le café, le poivre et les arbres fruitiers. La dominance pour une culture donnée est égale au ratio d’équivalence de densité de cette culture sur la parcelle considérée, divisée par le ratio d’équivalence de densité total de la parcelle.

Les auteurs soulignent le caractère intensif des productions de poivre et de café, avec un recours massif aux intrants. Si ce mode de production permet d’atteindre des rendements importants, il induit également une dégradation de la qualité des sols et de l’écosystème, ainsi qu’une fragilisation de la situation financière des caféiculteurs lorsque les cours mondiaux sont bas. Ils montrent aussi que les systèmes diversifiés font preuve de résilience. Celle-ci est économique, avec une marge brute deux fois plus importante que les exploitations en monoculture, même si les coûts de main-d’œuvre sont exclus du calcul de cette marge, ce qui constitue une des principales limites de l’étude. La résilience est aussi environnementale, avec une production moins sensible aux aléas climatiques tels que les sécheresses.

En conclusion, les auteurs anticipent une poursuite de la diversification des cultures, en raison notamment de l’expansion des cultures fruitières dans l’ensemble de l’Asie du Sud-Est ces dernières années. Cela pourrait se traduire par une baisse des cours mondiaux.

Johann Grémont, Centre d’études et de prospective

Source : Ecological Economics

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