Une analyse des écarts de revenus entre ménages agricoles et non agricoles

La parité de revenus entre les agriculteurs et les autres catégories d’actifs est un des objectifs fondateurs de la Politique agricole commune (PAC), et elle demeure une priorité affichée par les pouvoirs publics. Pourtant, un nombre croissant d’études suggère que ces écarts ne sont plus aussi importants qu’ils l’ont été. Pour éclairer ces débats, des économistes ont, dans un article publié dans la revue Journal of Common Market Studies, comparé le revenu des ménages agricoles de l’Union européenne (UE) à celui des ménages non agricoles.

Ce travail a mobilisé les données de la base « Statistiques de l’UE sur le revenu et les conditions de vie ». Son originalité tient au fait que les auteurs traitent les écarts de niveau de vie le long de la courbe de distribution des revenus, alors que la plupart des recherches sur le sujet se limitent à la comparaison des valeurs moyennes et médianes.

L’analyse des données montre d’abord que 40 % des ménages agricoles européens se situent dans le quartile inférieur de revenu, contre seulement 15 % dans le quartile supérieur. Une régression linéaire (méthode des moindres carrés) a ensuite été réalisée, en contrôlant les facteurs connus pour influer sur le revenu, afin d’isoler l’effet spécifique de la catégorie socio-professionnelle : âge, niveau d’éducation, taille du ménage, lieu de résidence, etc. Elle met en évidence une corrélation négative, et statistiquement significative, entre le niveau de revenu et le caractère agricole des ménages : en moyenne, le revenu des ménages agricoles demeure inférieur à celui des ménages non agricoles. Cependant, l’analyse par quartile met en évidence des contrastes intéressants. Si pour les premiers quartiles de revenu la même corrélation s’observe, la relation s’inverse dans le dernier quartile. Dit autrement, les ménages agricoles situés dans le dernier quartile de revenu ont un niveau de vie significativement supérieur à celui des ménages non agricoles de ce même quartile.

En conclusion, les auteurs appellent à mieux cibler les soutiens au revenu de la PAC sur les ménages modestes, principalement situés dans les pays d’Europe centrale et orientale. C’est en effet pour eux qu’un écart de revenu avec les ménages non agricoles subsiste. À l’inverse, les soutiens à destination des ménages agricoles aisés, situés pour une large part dans les pays de l’ouest de l’UE, pourraient être réduits.

Mickaël Hugonnet, Centre d’études et de prospective

Source : Journal of Common Market Studies

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