Sécurité sanitaire des aliments à base de cellules animales

Début avril 2023, un rapport d’information sur les produits et procédés de l’industrie cellulaire animale a été publié par la commission des affaires économiques du Sénat. L’ambition des entrepreneurs de ce secteur est de fournir des alternatives aux produits alimentaires issus des filières d’élevage (viandes, poissons, laitages, œufs).

Pour leur commercialisation, ces nouveaux produits nécessitent une autorisation de mise sur le marché, donnée par les autorités compétentes des États. Seul Singapour en a délivré une, en 2020, pour une viande de poulet entièrement fabriquée en laboratoire. Mais avec le fort développement de ce secteur (plus d’une centaine de startups à travers le monde), un nombre croissant de pays vont être confrontés à des demandes d’autorisation. Par exemple, aux États-Unis, deux pré-autorisations ont été accordées récemment aux sociétés Upside Food et GOOD meat. En Europe, fin mars, l’Italie a présenté un projet de loi visant à interdire la production de ces aliments sur son territoire. Or, seule la Commission, après avis de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), est compétente pour décider de la mise sur le marché de ces « nouveaux aliments ». Les États membres ne pourront dès lors s’opposer à leur commercialisation sur leur territoire, en raison du principe de libre circulation des marchandises. Anticipant cette situation, les auteurs du rapport sénatorial recommandent de renforcer le cadre réglementaire national et européen : moratoire sur l’usage du sérum fœtal bovin dans les milieux de culture, taxation selon les volumes produits, meilleure information du consommateur par des règles sur la dénomination et l’étiquetage de ces aliments. Ils invitent aussi à intensifier la recherche sur la production des aliments cellulaires, afin d’éviter toute dépendance technologique et de mieux anticiper ses différents impacts (social, économique, sanitaire, environnemental).

Par ailleurs, pour accompagner les autorités compétentes dans les processus d’évaluation, la FAO et l’OMS ont récemment fait appel à plusieurs experts internationaux, pour dresser une liste des dangers (biologiques, chimiques, physiques, allergiques) identifiés aux différentes étapes de la production de ce type d’aliments (figure ci-dessous). 41 dangers sur 53 sont communs avec les aliments dits « conventionnels ». D’autres sont rencontrés dans des domaines tels que les aliments génétiquement modifiés ou issus de la fermentation de précision, l’alimentation à base d’insectes, la thérapie cellulaire, etc. Le risque de survenue est variable, ainsi que le niveau de gravité pour la santé. Les auteurs soulignent que la maîtrise de ces dangers est conditionnée par la règlementation s’appliquant à la production et les contrôles imposés aux industriels par les autorités sanitaires.

Exemples des dangers potentiels et préoccupations nouvelles en matière de sécurité sanitaire, aux différentes phases de la production d’aliments à base de cellules animales
Source : FAO-OMS
Lecture : des exemples de dangers/préoccupations en matière de sécurité sanitaire sont présentés, en distinguant ceux potentiellement nouveaux pour les produits alimentaires (dernière ligne). Les 4 principales phases de la production d’aliments à base de cellules animales sont :
– la sélection des cellules (par biopsie de tissus cellulaires sur un animal vivant ou mort, ou à partir d’une lignée cellulaire) ;
– la différenciation et la prolifération des cellules au sein d’un bioréacteur ;
– la récolte des cellules d’intérêt pour le produit final (cellules musculaires, graisseuses, etc.) ;
– la transformation alimentaire (ajout d’autres ingrédients, conservateurs, etc.).

Jérôme Lerbourg, Centre d’études et de prospective

Sources : Sénat, FAO-OMS

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