« Souveraineté alimentaire » : un rapport pour clarifier les enjeux

La crise de la Covid-19 et la guerre en Ukraine ont entrainé des bouleversements rapides des marchés agricoles et agroalimentaires. Leur enchaînement a remis au premier plan politique et économique la question de la « souveraineté alimentaire », sans que le sens de cette expression ne soit toujours explicité.

Afin d’éclairer le débat, FranceAgriMer a publié en mars 2023 un rapport sur cette souveraineté alimentaire, approchée par les indicateurs macroéconomiques des bilans de consommation. S’il n’existe pas de définition unique, ces travaux, présentés lors du dernier Salon international de l’agriculture, considèrent la « souveraineté » comme une maîtrise suffisante des dépendances externes, qu’elles soient plus ou moins choisies, nécessaires ou indispensables. Par produit ou groupe de produits substituables entre eux, les approches par bilan mettent en regard les ressources (productions, importations et éventuelle baisse des stocks) et les utilisations (consommations, exportations et stockage éventuel).

Ceci permet de calculer quatre indicateurs complémentaires. Le taux d’auto-approvisionnement rapporte la production à la consommation et mesure la capacité de la France à assurer son autosuffisance en volume (hors différences de qualité ou de piéçage). Le taux de couverture de la consommation par la production nationale désigne la part de la consommation intérieure effectivement couverte par la production nationale en tenant compte du fait qu’une partie de la production est exportée, ce qui permet d’estimer l’adéquation effective ou le décalage entre production et demande intérieures. Par exemple, la consommation de filets de poulet est supérieure à celle des autres morceaux, et pas entièrement couverte par la production nationale, le complément est donc importé. Dans d’autres cas, une partie de la production peut être exportée car non conforme aux demandes intérieures. La capacité d’exportation (part des ressources exportée) et, à l’inverse, la dépendance aux importations (place des importations dans la consommation) mesurent l’insertion relative du pays dans les échanges extérieurs. Calculés sur dix ans pour trente produits, ces indicateurs éclairent les situations respectives des filières (figure ci-dessous).

Taux d’auto-approvisionnement de la France par produit (trois dernières années disponibles selon les cas)
Source : FranceAgriMer

Les auteurs raffinent les indicateurs, en distinguant notamment les achats intracommunautaires des importations de pays tiers, et en analysant la concentration de nos fournisseurs. À partir d’indicateurs macro-économiques, ils apportent là une contribution significative au débat, tout en faisant ressortir, selon les cas, la complexité des filières et des marchés, que les chiffres auraient pu masquer.

Jean-Noël Depeyrot, Centre d’études et de prospective

Source : FranceAgriMer

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