L’agriculture et ses actifs en images

Comme chaque année, le dernier Salon international de l’agriculture a été précédé de nombreuses parutions. Des films, séries, documentaires et études littéraires ont ainsi mis en circulation, plus qu’à tout autre moment de l’année, des images et opinions sur l’agriculture. Celles-ci s’inscrivent souvent dans des représentations anciennes et durables, mais elles véhiculent aussi parfois de nouveaux cadres d’interprétation de l’activité agricole.

La Revue des sciences humaines a publié en janvier un article de F. Gris sur trois récits autobiographiques qui dessinent, selon lui, un portrait global, psychologique et sociologique, des néo-paysans français contemporains (Bergère des collines, De la neige pour Suzanne, Anaïs s’en va-t-en-guerre). Alors que le monde ouvrier a abrité, dans les années 1970, « les gestes politiques, les engagements littéraires et intellectuels les plus bruyants », l’installation agricole des années 2020 apparaît, dans les récits de vie, comme un projet qui lie politique et écologie, voire aménagement du territoire et paysages. Pour l’auteur, le geste néo-paysan aurait vocation à agir sur les réalités biophysiques, sur le territoire et ses habitants.

La répétition du motif judiciaire est une caractéristique des fictions très contemporaines, comme l’a montré un article de Droit et littérature. S’inspirant des affaires Monsanto et Triskalia, J.-X. de Lestrade relate lui, dans la saison 2 de la série Jeux d’influence (décembre 2022), les rapports de force autour d’un scandale sanitaire liant lait contaminé et céréales toxiques. Le film Goliath (2023), thriller judiciaire, s’ouvre lui sur l’incapacité de plaignantes agricultrices à faire reconnaitre un préjudice subi.

Mais l’une des caractéristiques de la création cinématographique contemporaine, en France, reste la prégnance de l’image traditionnelle du paysan. Les auteurs le filment loin des industries agroalimentaires. Caméra à l’épaule, les documentaristes le suivent au travail, ils privilégient le portrait et adoptent ses points de vue. Paysans du ciel à la terre, sorti en mars 2023 (figure ci-dessous), montre le rapport des agriculteurs à la terre et leurs choix de pratiques agronomiques alternatives : diversité des assolements, non-labour, remise de parcelles en prairies permanentes, usages d’engrais verts considérés comme une « culture à part entière ».

Image du film Paysans du ciel à la terre
Source : Les 4 éléments – Arras

Le roman graphique et celui de jeunesse ont été discutés, en décembre 2022, lors d’un colloque organisé conjointement par les universités de Lille, de Gand et de Louvain. Enfin, une exposition de photographies a mis en valeur, en début d’année, les agricultures de Guyane autour de six axes : manger, croire, cueillir, cultiver, faire et soigner (figure ci-dessous).

Affiche de l’exposition Kalalou, des plantes et des Hommes

Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective

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