Recommandations de l’Assemblée citoyenne suisse pour une politique alimentaire

En novembre 2022, l’Assemblée citoyenne pour une politique alimentaire de la Suisse a remis à la Fédération ses conclusions et recommandations, à l’issue de cinq mois de travaux. Ce groupe de 85 personnes résidant en Suisse, tirées au sort puis sélectionnées pour représenter la diversité de la population, avait pour mandat de formuler des préconisations pour une évolution vers un système alimentaire national durable à l’horizon 2030. Elles se sont appuyées sur des présentations par des parties prenantes et des experts, abordant les connaissances disponibles, les enjeux et les moyens d’action (figure 1).

Figure 1 – La pyramide suisse alimentaire et ses impacts environnementaux

Source : Société suisse de nutrition
Lecture : l’impact environnemental des denrées, de la production au supermarché, calculé selon la méthode de la saturation écologique, est synthétisé dans une valeur unique, l’Unité de charge écologique (UCE, colonne de droite). Elle est exprimée dans le tableau pour la portion (colonne du centre) recommandée par la Société suisse de nutrition. Plus l’UCE est élevée, plus l’impact sur l’environnement est estimé important.

Cinq domaines ont été traités : santé, environnement, production agricole, économie et politiques sociales. En matière d’environnement, l’activité agricole est à l’origine de 15 % des émissions de gaz à effet de serre (figure ci-dessous) et de 70 % de celles de polluants atmosphériques azotés (figure 2). Un portrait contrasté de l’élevage suisse a aussi été réalisé. On y voit des pratiques hors-sol importantes (entraînant un découplage entre surfaces occupées et production animale), une part élevée d’auto-approvisionnement en fourrages (85 %) grâce aux surfaces en prairies, mais aussi une dépendance vis-à-vis de l’extérieur pour les aliments concentrés. En 2020, plus de la moitié de ces aliments était importée, correspondant à une surface de 250 000 hectares dans les pays d’origine.

Figure 2 – Composition et origine des émissions agricoles en 2019 (en tonnes équivalent CO2)
Source : Institut fédéral de recherches sur la forêt, la neige et le paysage
Lecture : de gauche à droite, émissions liées aux vaches à viande (méthane), au stockage des engrais sur les exploitations (méthane et protoxyde d’azote), à la fertilisation (protoxyde d’azote), à la production d’engrais et de pesticides (dioxyde de carbone, protoxyde d’azote), aux importations d’aliments et à l’utilisation d’énergie pour l’activité agricole.

137 recommandations ont finalement été formulées et soumises au vote des membres de l’Assemblée citoyenne. Elles laissent entrevoir des citoyens partagés, aux jugements nuancés. À titre d’exemple, la recommandation sur des garanties d’achat à long terme données aux producteurs, pour répartir le coût des risques climatiques, a été approuvée à 71 %, mais les membres de l’Assemblée sont encore plus enclins à améliorer l’efficacité du marché et à soutenir les producteurs dans la définition de leur « modèle d’entreprise » (98 % d’approbation). En matière d’alimentation, la promotion des produits de saison par la grande distribution a fait l’unanimité, mais l’introduction d’une taxe sur les denrées alimentaires à forte teneur en CO2 n’a été approuvée qu’à 57 %, et la réduction des cultures de betteraves sucrières a elle été rejetée. Le futur de l’élevage a fait l’objet de plusieurs préconisations : diminution de la production de poulets et de porcs, productions bovines et ovines préférentiellement localisées dans les zones de montagnes et de collines. La réduction des cultures fourragères de 30 %, d’ici 2030, pour y installer des productions végétales, a été moins largement plébiscitée, et un autre levier lui a été préféré (diminution des importations d’alimentation animale).

Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective

Source : https://www.buergerinnenrat.ch/fr/recommandations/

 

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