Pollution des eaux de surface et des nappes phréatiques par les engrais et les pesticides

En octobre 2024, l’Agence européenne de l’environnement a publié un rapport sur l’état de l’eau en Europe. Elle souligne qu’en 2021, seulement 29 % des eaux de surface (rivières, lacs, etc.) avaient un « bon état chimique » et 77 % des eaux souterraines (le « bon état » de l’ensemble des masses d’eau était fixé pour 2015). Les pesticides et les nutriments utilisés en agriculture sont mis en avant comme la principale pression commune aux eaux superficielles et aux aquifères. Le rapport aborde aussi les événements extrêmes (sécheresses, inondations, etc.) qui tendent à se multiplier avec le changement climatique, comme le détaille l’organisation météorologique mondiale, et qui accentuent les pollutions, notamment des captages d’eau potable (ex : augmentation des concentrations en pesticides et en nitrates quand le niveau des masses d’eau baisse).

En France, le récent bilan de la mise en œuvre de la directive « nitrates » sur la période 2020-2023 indique que 17,6 % des stations échantillonnées en eaux souterraines ont une concentration maximale en nitrates supérieure ou égale à 50 mg/l, ce qui en fait des eaux polluées aux nitrates. Les eaux superficielles sont moins affectées (8 % des stations échantillonnées), mais elles sont sujettes au risque d’eutrophisation (au moins 46 % d’entre elles). Les données présentées dans le rapport montrent que la situation reste globalement stable depuis quatre ans, qu’il s’agisse des nappes phréatiques ou des eaux de surface.

Dans le cadre de l’application de la directive « eau potable », la Commission européenne a saisi la Cour de justice de l’Union européenne fin juillet, pour non-respect de la concentration maximale de nitrates d’une centaine de zones de distribution, dans 7 régions françaises. Le XXIIe atelier international sur l’azote, intitulé « Résoudre le dilemme mondial de l’azote. Opportunités et défis », indique que la gestion de ce nutriment continue de soulever des problèmes majeurs.

En ce qui concerne les pesticides, la forte présence dans les masses d’eau (et plus spécifiquement dans l’eau potable) de « polluants éternels » PFAS, issus de l’industrie et de l’agriculture, a été récemment investiguée par Radio France (ici, ici et ici) (voir également un précédent billet). Générations Futures publie, de son côté, un rapport sur la surveillance des métabolites de pesticides (molécules issues de leur dégradation) (figure) : 56 d’entre eux ne seraient pas suivis ou pas suffisamment, alors que leurs concentrations risqueraient de dépasser la norme pour l’eau potable. Dans le cadre de sa mission de phytopharmacovigilance (figure), l’Anses recommande quant à elle, dans son dernier rapport annuel sur les produits phytopharmaceutiques, de surveiller en France, de façon accrue, deux métabolites nouvellement identifiés pour le fongicide cyazofamide. Retrouvés en concentrations excessives dans les eaux souterraines au Danemark, ils devraient conduire à y interdire le cyazofamide.

Méthodologie de l’étude conduite par Générations Futures concernant la surveillance des métabolites de pesticides
Source : Générations futures

Karine Belna, Centre d’études et de prospective

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