Application d’échanges de produits alimentaires, gaspillage et émissions de gaz à effet de serre

Un article publié en mars dans Nature Communications estime les impacts sociaux et environnementaux de l’utilisation d’OLIO, application d’échanges entre particuliers de produits alimentaires proches de la date de péremption ou achetés en trop. Lancée en 2015, elle rassemble à ce jour 700 000 utilisateurs dans le monde, dont 73 % au Royaume-Uni. L’étude porte sur la région du Grand Londres et s’appuie sur des données couvrant 19 mois (avril 2017 – octobre 2018).

Les produits enregistrés sur la plate-forme sont regroupés, par une méthode de classification automatique, en 13 catégories selon leurs caractéristiques (frais, congelé ou sec, valeurs nutritionnelles, etc.). Pour chaque échange, des recoupements sont effectués avec les données du recensement britannique pour approcher les caractéristiques sociales des individus. De même, des données géographiques, déclarées dans l’application, permettent d’estimer les émissions de gaz à effet de serre (GES) résultant des déplacements des protagonistes, reconstitués grâce à l’API HERE. 6 scénarios de transport sont ensuite testés, selon le mode choisi (ex. : voiture uniquement) et le niveau de rationalisation avec d’autres déplacements.

Au cours des 19 mois, 90 tonnes d’aliments ont été échangées, soit 60 % des produits proposés sur l’application, pour une valeur de 750 000 £. Quel que soit le scénario de transport, le recours à ce système d’échanges a un niveau d’émissions de GES plus bas que l’achat des quantités équivalentes dans le commerce, permettant d’éviter le rejet de 87 à 156 t CO2eq. Par ailleurs, les échanges ont principalement lieu entre personnes à faibles revenus, mais disposant d’un haut niveau d’études : le développement de ce type de plateforme aurait donc un potentiel limité de réduction de l’insécurité alimentaire (laquelle touche 10 % des Britanniques). Enfin, étant donné que sont gaspillés 124 à 154 kg/pers/an au niveau des magasins et de la consommation finale (soit 10 à 25 % des dépenses alimentaires des ménages), ce type d’applications représente, pour les auteurs, une perspective intéressante d’optimisation des ressources. Ils soulignent toutefois des freins pour les utilisateurs : temps et investissement personnel pour proposer un produit de valeur faible ou nulle ; réticence à consommer une denrée de « seconde main » ; offre limitée en volume et en diversité.

Nombre et pourcentage d’échanges par catégorie de produits alimentaires proposés sur l’application, en fonction du type d’utilisateur

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Source : Nature Communications

Lecture : en abscisses, de gauche à droite : produits de boulangerie ; aliments dits « de base » (farine, boîtes de conserve, huile, condiments, etc.) ; fruits, légumes et aromates ; plats préparés ; sandwiches ; snacks ; boissons (autres que thé ou café) ; thé et café ; autres (pouvant intégrer plusieurs catégories) ; produits laitiers ; protéines animales (viande et substituts, œufs, etc.) ; produits congelés ; aliments pour bébé.

En jaune foncé, produits proposés et échangés par les bénévoles de l’application ; en jaune clair, par les autres utilisateurs ; en gris foncé, produits proposés par les bénévoles n’ayant pas trouvé preneur ; en gris clair, produits proposés par les autres utilisateurs n’ayant pas trouvé preneur.

Aurore Payen, Centre d’études et de prospective

Source : Nature Communications

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