Une prospective sur la biodiversité et les territoires en 2030
Le MEDDE a publié dans la série Etudes et documents une synthèse de l’exercice Biodiversité et territoires 2030. Signalons que seuls les premiers volets du projet sont exposés dans ce document de synthèse, les autres volets (prise en compte de la biodiversité sur le long terme et propositions stratégiques) devraient faire l’objet d’une nouvelle publication.
Partant du constat de l’érosion de la biodiversité, de l’importance des activités et des décisions humaines sur ce sujet, enfin de l’importance des incertitudes en la matière, le MEDDE a privilégié une approche prospective, par scénarios, pour aborder les enjeux pour la biodiversité à l’horizon 2030. Au rang des éléments-clés au devenir incertain figure notamment la PAC d’aujourd’hui, de demain et d’après-demain.
Les travaux ont mobilisé un groupe d’une trentaine d’experts ainsi que divers bureaux d’études. La démarche a fait émerger 5 scénarios contrastés, construits sur la base de quatre composantes structurantes : jeu institutionnel et politiques, demande sociale, activités sectorielles et enfin dynamiques naturelles, ces dernières traitées comme variables de contexte.
Le scénario 1, « Biodiversité arbitrée », est un scénario tendanciel qui voit l’arbitrage final se faire en faveur des intérêts économiques. Le scénario 2, « Biodiversité citoyenne », est marqué par une crise environnementale majeure qui déclenche un vaste mouvement « pro-biodiversité ». Dans le troisième scénario, « Biodiversité imposée », dans un contexte de crise et de dépendance aux ressources, l’État est garant des fonctions naturelles. Le scénario 4, « Biodiversité ignorée » est celui du court terme et de l’utilisation des ressources au service de la relance économique planifiée. Enfin, le scénario 5, « Biodiversité sur les marchés » voit la privatisation de la gestion de la biodiversité et la mise en place de services écosystémiques.
Pour ce qui concerne les aspects agricoles, deux de ces scénarios (2 et 3) envisagent plutôt un retour au rural dans des contextes isolationnistes, un autre une agriculture principalement intensive (4), les deux derniers envisagent plutôt une agriculture duale selon les territoires plus ou moins protégés au regard de la biodiversité.
L’exercice s’est prolongé par une phase de territorialisation des impacts en termes de biodiversité. Le groupe a ainsi distingué 10 types de paysages (terres arables, milieux bocagers, prairies permanentes, forêts, etc.) et 10 grands territoires découpant l’espace métropolitain.
Les résultats ont ainsi été déclinés, pour le scenario tendanciel « biologie arbitrée », à la fois par territoire et par type de paysage. Pour les autres scénarios, en revanche, seul le filtre des paysages a été mobilisé (impacts en termes de surfaces couvertes par ces paysages et de qualité de biodiversité qui les composent).
Le document dégage sur cette base quelques conclusions de portée générale (« sauf crise écologique, la réglementation devrait continuer à être un levier essentiel de préservation ») et par type de paysage. Ainsi, la qualité de la biodiversité des milieux cultivés dépend certes du scénario retenu, mais avec un risque important de dégradation, au mieux de stagnation. Inversement, les milieux de bocage gagneraient (ou au mieux se stabiliseraient) en surface et en qualité. Les prairies permanentes, en revanche, présentent selon les auteurs une « tendance à la dégradation dans tous les scénarios », de même que les forêts.
Pierre Claquin, Centre d’études et de prospective
Source : MEDDE