Les effets de l’assurance récolte sur les cultures non irriguées au Kansas
Aux États-Unis, plus de 80 % des surfaces cultivées sont assurés, notamment parce que cette souscription est très subventionnée et qu’elle est obligatoire pour bénéficier d’une couverture de base en cas de catastrophe naturelle. Le Journal of the Agricultural & Applied Economics Association publie un article, de trois chercheurs des universités du Kansas et du Nouveau Mexique, qui analysent les effets de ces assurances sur les pratiques des agriculteurs face au réchauffement climatique. Leur hypothèse est que la modération du coût des assurances, du fait des subventions, constitue un frein à l’adoption de modes de cultures plus adaptés au contexte climatique, lesquels favoriseraient de meilleurs rendements.
Leur travail se fonde sur les données fournies par l’association de gestion agricole du Kansas (Kansas Farm Management Association), concernant les rendements de 9 402 parcelles de blé et de maïs relevant de 643 exploitations possédant des terres arides non irriguées. Les résultats montrent qu’en cas de chaleur extrême, l’adhésion à une assurance n’a pas d’effet statistiquement significatif sur le rendement du blé. En revanche, la baisse de rendement du maïs est d’autant plus forte que les surfaces assurées sont importantes.
Régression en panel du rendement du maïs sur les variables météorologiques, les mesures d’assurance récolte et leurs interactionsSource : Journal of the Agricultural & Applied Economics Association
Lecture : la colonne (1) montre la régression du logarithme de rendement du maïs selon différents paramètres pour le panel étudié. La colonne (2) pour un taux de surfaces assurées de 65 % et la colonne (3) pour un taux de surfaces assurées de 70 %. La colonne (4) étend la régression de la colonne (1) si une assurance est souscrite quelle que soit la surface assurée.
Ainsi, les auteurs déterminent qu’un degré-jour supplémentaire au-dessus de 29 °C, pendant la saison de croissance du maïs, réduit le rendement de 0,8 % dans le cas général et de 1,1% sur les superficies entièrement assurées. Ils avancent plusieurs hypothèses pour expliquer ces résultats. La première est celle de l’aléa moral (une personne assurée contre un risque peut se comporter de manière plus risquée). Ainsi, les agriculteurs assurés adopteraient moins souvent des variétés plus résistantes à la chaleur. La seconde explication est que les exploitants auraient tendance à assurer prioritairement les parcelles les plus sensibles au stress thermique. Enfin, l’assurance étant fortement subventionnée, elle n’est pas vue comme une charge financière par l’exploitant et pourrait donc encourager des pratiques agronomiques plus risquées (densité de plantation). En revanche, les auteurs n’expliquent pas les différences constatées entre le maïs et le blé.
Pour contribuer à la pérennité des systèmes de cultures non irriguées, les auteurs préconisent l’amélioration de l’information des agriculteurs sur les pratiques permettant une meilleure résistance aux aléas climatiques. Ils insistent aussi sur le développement d’une offre de contrats d’assurance incitant à réduire les risques.
Julie Blanchot, Centre d’études et de prospective
Source : Journal of the Agricultural & Applied Economics Association