Usages futurs de la biomasse et gouvernance renouvelée

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a publié en mai 2023 un avis sur la gouvernance de la biomasse. Selon les rapporteurs, la transition écologique devrait d’ici 2050 bouleverser ses usages, occasionnant ainsi des choix qui exigent selon les rapporteurs une nouvelle gouvernance. S’appuyant sur une étude réalisée par Solagro et l’Iddri, le rapport rappelle que la biomasse terrestre représente en métropole 310 millions de tonnes de matière sèche (graines, fruits et légumes, fourrages, résidus de cultures, bois en forêts et hors forêts).

De manière générale, les usages de la biomasse s’inscrivent dans des hiérarchies d’usage. Par exemple, la biomasse issue de cultures alimentaires est utilisée, par ordre décroissant de priorité, pour l’alimentation (humaine et animale), la biofertilisation, puis pour les matériaux et l’énergie. De même, les parties nobles du bois neuf servent d’abord à la construction ou à l’ameublement.

Un tiers de la biomasse terrestre est utilisé comme fourrage ou concentré, dans le cadre de l’alimentation animale. Mais de profonds changements seront nécessaires pour répondre aux objectifs de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) de la France, qui prévoit à l’horizon 2040 une multiplication par deux des usages énergétiques de la biomasse, en remplacement des énergies fossiles, et une hausse de 40 % des besoins pour l’industrie. En 2028, 24 % de la consommation finale brute de chaleur et de froid devront avoir pour origine la biomasse. Selon les rapporteurs, l’atteinte de tels objectifs n’est pas compatible avec l’actuelle fragmentation des objectifs stratégiques et des dispositifs de gestion. La Stratégie nationale de mobilisation de la biomasse (SNMB) n’a pas de pouvoir de prescription et elle cohabite avec des schémas régionaux, lesquels font d’ailleurs défaut dans quatre régions. Elle n’est pas articulée à la SNBC, ni même à la Programmation pluriannuelle de l’énergie.

Le CESE préconise une sobriété de tous les usages de la biomasse, incompatible avec la part qu’y représentent à l’heure actuelle l’alimentation animale et l’exportation, qui devraient « suivre une trajectoire de réduction en concertation avec les acteurs concernés ». D’autres préconisations portent sur la gouvernance au niveau national. Par exemple, deux scénarios sont proposés pour l’Observatoire national des ressources en biomasse (FranceAgriMer), envisageant un fonctionnement plus transverse incluant les questions énergétiques et climatiques, ainsi qu’un élargissement de la tutelle incluant le ministère chargé de la transition écologique. À l’échelon local, les « cellules biomasse » devraient favoriser le dialogue entre les communautés forestière, agricole, énergétique et industrielle, le Schéma régional de développement, d’aménagement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) pouvant alors se muer en un lieu de discussion des priorités productives de la région.

Nathalie Kakpo, Centre d’études et de prospective

Source : CESE

image_pdfimage_print