Augmentation de la fréquence et du taux de mycotoxines dans le blé européen

Une équipe de recherche anglo-néerlandaise a récemment publié, dans Nature Food, une analyse des données de contamination des blés européens par les mycotoxines, sur la période 2009-2019. Cette contamination augmente en fréquence et en quantité, et touche des régions relativement épargnées jusqu’ici.

Les mycotoxines, produites par des champignons du groupe des Fusarium, affectent les céréales et en particulier le blé (pertes de rendement, altération de la qualité physique des grains). Elles peuvent aussi les rendre impropres à la consommation humaine : à forte dose elles ont des effets délétères sur plusieurs organes vitaux ; à faible dose répétée elles induisent des cancers, modifient l’ADN et sont néfastes au fœtus. L’alimentation animale peut aussi être concernée, en cas de concentration trop importante. Se développant particulièrement à la faveur de printemps et d’étés chauds et humides, ces mycotoxines sont résistantes à la chaleur (cuisson, stérilisation) et elles persistent dans la chaîne alimentaire. La réglementation européenne impose donc des seuils maximum pour la consommation humaine et formule des préconisations pour l’alimentation animale.

Les auteurs ont utilisé les données de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et de l’enquête BIOMIN. Ils ont mesuré la fréquence et le taux des contaminations, en fonction des années et des pays, pour le déoxynivalénol (DON) (appelé aussi vomitoxine), mais également pour les co-contaminations par d’autres mycotoxines. Ils ont ainsi constaté que la fréquence augmentait au cours de la décennie 2009-2019 et que les contaminations progressaient notamment dans les pays au sud du 47e parallèle (dont la France). La hausse des températures durant le printemps, concomitante aux précipitations saisonnières, semble être une des explications.

Évolution de la contamination par les mycotoxines du blé meunier (en haut) et fourrager (en bas) au cours de la période 2010-2019
Source :Nature Food
Lecture : en a, proportion d’échantillons contenant des mycotoxines, selon le type. En b, concentration moyenne en vomitoxine. En c, évolution annuelle moyenne.

Le taux de contamination des blés fourragers est nettement supérieur à celui du blé meunier : en effet, en cas de dépassement des seuils autorisés pour l’alimentation humaine, celui-ci est déclassé en blé fourrager. Ce déclassement engendre des pertes économiques pour les agriculteurs, que les chercheurs ont estimé à 3 milliards d’euros sur la décennie étudiée. Par ailleurs, ils alertent sur les conséquences, moins bien connues, d’une exposition régulière aux mycotoxines. Enfin, les co-contaminations étant en hausse, ils soulignent la nécessité d’étudier l’impact croisé de différentes mycotoxines.

Muriel Mahé, Centre d’études et de prospective

Source : Nature Food

 

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