Vers le « zéro chlordécone » : 48 propositions pour réparer les préjudices occasionnés en Guadeloupe et en Martinique

L’Assemblée nationale a publié en décembre le rapport d’une Commission d’enquête sur les impacts économique, sanitaire et environnemental de l’utilisation du chlordécone comme insecticide agricole en Guadeloupe et Martinique, ainsi que sur les responsabilités publiques et privées dans la prolongation de son autorisation. L’objectif était également d’évaluer la nécessité et les modalités d’une indemnisation des préjudices pour ces territoires.

Autorisé à la vente entre 1972 et 1993, le chlordécone fut utilisé, dans les plantations de bananes antillaises, pour lutter contre le charançon, en dépit de sa dangerosité pour l’environnement et la santé humaine. Cette toxicité avait ainsi été constatée dès les années 1970 (scandale d’Hopewell, classement de la molécule comme « cancérigène possible » en 1979, etc.). Depuis, le lien épidémiologique a été démontré entre cette substance et l’incidence du cancer de la prostate, de troubles du neuro-développement de l’enfant et de la prématurité des naissances. Malgré le retrait de l’autorisation du chlordécone en 1993, les terres et eaux antillaises sont encore contaminées du fait de sa forte rémanence dans les sols. Ainsi, la molécule est présente dans 36 % des échantillons d’eau analysés en Basse-Terre de Guadeloupe et 90 % des sources martiniquaises seraient pollués. Cette contamination se retrouve par la suite dans les denrées alimentaires produites localement (ex. : racines et tubercules, élevages de ruminants, crustacés).

Pathologies étudiées et modes d’action susceptibles d’expliquer les principales associations observées en lien avec les expositions environnementales au chlordécone

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Source : Assemblée nationale

Le rapport retrace l’histoire de l’usage de cette molécule et de son autorisation en agriculture. Il démontre la responsabilité de multiples acteurs, au premier rang desquels l’État qui, en autorisant la molécule alors que sa toxicité et sa rémanence étaient avérées, a mis en danger les populations locales. Les auteurs citent ensuite les acteurs privés (producteurs et distributeurs de chlordécone, représentants du secteur de la banane) qui ont joué un rôle important dans le maintien de la molécule sur le marché, et ce même après le retrait de son homologation.

Les députés présentent enfin 49 recommandations pour « sortir » du chlordécone et réparer les préjudices, parmi lesquelles la co-construction du prochain « plan chlordécone » avec les populations locales, la réalisation d’une cartographie intégrale de l’état de contamination des sols, un dépistage et un suivi sanitaire systémiques et gratuits pour les populations les plus exposées. Ils recommandent également un accompagnement des agriculteurs dans les démarches de dépollution, un financement prioritaire de la recherche sur les effets du chlordécone sur la santé et la mise en place d’un fonds d’indemnisation pour les victimes atteintes de pathologies occasionnées par l’exposition à cette molécule.

Estelle Midler, Centre d’études et de prospective

Source : Assemblée nationale

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