Colloque « Les aliments voyageurs » de la Chaire Unesco Alimentations du monde

Ce 7e colloque international de la Chaire Unesco Alimentations du monde, tenu en février 2018 à Montpellier, et dont la synthèse et les vidéos ont été diffusées récemment, proposait de traiter de la thématique des « aliments voyageurs ». Autour de plusieurs sessions de présentations et de discussions, le fil rouge de la journée était la façon dont les aliments et les pratiques alimentaires se sont associés aux voyages des hommes. Sur cette question, plusieurs intervenants de divers horizons, académiques ou professionnels, ont pu interagir.

Vidéo de présentation du colloque

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Source : Chaire Unesco Alimentations du monde

Les propos introductifs ont rappelé que près des deux tiers des aliments que nous consommons sont originaires d’une autre zone géographique. M. Chandeigne (éditeur, traducteur) a ainsi souligné que les voyages de navires espagnols et portugais, au cours du XVIe siècle, ont été les vecteurs d’un bouleversement alimentaire mondial. Plantes et graines ont été déplacées d’un continent à l’autre, comme le cocotier asiatique, le piment américain ou le caféier africain (voir à ce sujet un précédent billet sur ce blog). C. Grataloup (géohistorien) s’est quant à lui intéressé à l’histoire du petit-déjeuner et aux origines de ses produits phares, thé, café et cacao, issus de trois continents différents (voir à ce sujet un précédent billet sur ce blog). Le repas matinal, organisé autour de l’une de ces boissons chaudes, a émergé en Europe au début du XVIIIe siècle, d’abord dans les couches sociales aisées, puis s’est popularisé au cours du siècle suivant. Le développement de ces pratiques en Occident, inscrit dans de plus larges processus politico-économiques, n’a pas été sans conséquences négatives : colonialisme, traites esclavagistes et déportations d’hommes.

Pour K. Mouzawak (activiste culinaire libanais), les aliments ne voyagent pas seuls, ce sont les hommes (conquérants, colonisateurs, marchands, immigrés, etc.) qui voyagent et les transportent avec eux. Étudiant les effets de la migration, M. Lefebvre (nutritionniste) montre que si les arrivants enrichissent culturellement et culinairement la nouvelle région d’accueil, celle-ci, par son offre de denrées plus abondante et différente, peut altérer la santé des nouveaux venus. Au-delà des aliments, ce sont les savoirs culinaires, recettes et concepts de plats qui voyagent. S. Sanchez (anthropologue) présente le cas de la pizza, partie à la conquête des tables du monde entier. Enfin, plusieurs projets autour de la transmission culinaire ont également été présentés : Tawlet de K. Mouzawak, Grandmas Projet de J. Parienté et le Refugee Food Festival de M. Mandrila. Il en ressort que la cuisine peut très vite devenir un geste politique et militant.

Arnaud Lamy, Centre d’études et de prospective

Source : Chaire Unesco Alimentations du monde

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