Une nouvelle étude sur l’effet cocktail des perturbateurs endocriniens

Un article publié dans la revue Environmental Health Perspectives étudie la perturbation endocrinienne androgénique en lien avec des mélanges de certaines substances chimiques. L’équipe de chercheurs inclut des membres de l’Inserm, du centre hospitalier universitaire de Rennes, de l’École des hautes études en santé publique (EHESP) et de l’Institute of Environment, Health and Societies.

L’expérimentation a porté notamment sur le maintien de la capacité des tissus à synthétiser la testostérone en cas d’exposition aux mélanges. Des tissus testiculaires humains, issus de fœtus du 1er trimestre de grossesse ont été utilisés. Ce type de tissus cultivés in vitro (FEGA pour FEtal Gonad Assay) conserve les caractéristiques androgéniques de l’organe. Les chercheurs ont sélectionné 11 substances chimiques parmi 27 courantes auxquelles les femmes enceintes peuvent ou pouvaient être exposées, incluant des pesticides utilisés en agriculture (chlordecone, imazalil, prochloraz, bitertanol, propiconazole), des médicaments (ketoconazole, acide valproïque, clomiphene, théophylline) et des produits utilisés industriellement (bisphénol A et S). Ces onze substances ont, seules, un effet plus ou moins prononcé de perturbation androgénique. Quatre mélanges différents ont été utilisés, deux comportant quatre composants et deux autres comportant huit composants. Le bisphénol A était inclus dans tous les mélanges.

Le calcul des effets potentiels des mélanges a été effectué d’après le modèle mathématique dit de Dose Additivity (DA), un des modèles de référence utilisés pour mesurer les effets des combinaisons de médicaments. L’incertitude statistique relative à l’effet toxique prédictif a été estimée avec la méthode de Boostrap à un intervalle de confiance de 95 %. Les auteurs ont ainsi mis en évidence un rapport de 1 à 10 000 entre l’effet d’une substance isolée et celui des mélanges, les mélanges comportant 8 molécules étant sensiblement plus actifs que les autres. Ainsi, l’effet androgène était augmenté, y compris quand les substances se trouvaient à des concentrations qui n’auraient pas occasionné d’effet isolément. Si des publications (notamment un rapport publié par l’OMS en 2013 et un article publié dans Environmental Health Perspectives en 2007) avaient déjà signalé les risques potentiels des effets cocktail, cette étude apporte des éléments d’intérêt pour l’évaluation de l’impact du risque associé aux mélanges et pour l’amélioration du modèle de prédiction.

Madeleine Lesage, Centre d’études et de prospective

Source : Environmental Health Perspective

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