L’agriculture : point faible ou atout pour le développement du Nigeria ?

Dans un article paru dans Le Déméter 2023, M. Brun (directeur scientifique de la Fondation Farm) et J. Denieulle (doctorant en géopolitique à l’université Reims Champagne-Ardenne) s’intéressent à la trajectoire et à la place du secteur agricole dans l’économie du Nigeria. Le pays, fortement dépendant des importations pour l’alimentation de sa population, est très exposé aux marchés mondiaux, bouleversés par la pandémie de Covid-19 puis par la guerre russo-ukrainienne.

Autosuffisant et exportateur net de produits agricoles (caoutchouc, arachide, huile de palme) dans les années 1960, le Nigeria est devenu largement importateur depuis les années 1970, lorsque le développement d’une économie de rente basée sur l’exportation de pétrole a entraîné des changements macroéconomiques, sociaux et politiques. La population s’est urbanisée et a orienté sa consommation alimentaire vers des produits importés (dont le blé pour la fabrication du pain), devenus compétitifs du fait de l’inflation nationale. Au cours des décennies suivantes, les mesures d’encouragement de la production nationale, pour le blé notamment (restrictions d’importations, développement de filières), ont pour la plupart échoué.

Le système productif actuel est insuffisant et mal adapté : crédits difficiles à obtenir, stockages inexistants, infrastructures dégradées. Désormais, les produits agricoles représentent 36 % de la valeur totale des importations. Bien que 70 % de la population soient employés dans l’agriculture, le secteur ne génère que 22 % du Produit intérieur brut (PIB). Les conditions climatiques dégradées exacerbent la pression sur les ressources naturelles et alimentent le conflit entre pasteurs et agriculteurs. La lutte des forces de sécurité contre Boko Haram entraîne aussi de fortes difficultés pour le développement de l’activité agricole.

Les auteurs notent cependant que l’agriculture reste le secteur économique le plus résilient du Nigeria, avec un réel potentiel agro-commercial (investissements directs étrangers, technologies et innovations, production d’engrais). Ces initiatives devront toutefois bénéficier à l’ensemble des producteurs agricoles, pour que le Nigeria demeure une puissance régionale.

Soulignons enfin que cette édition 2023 du Demeter réunit divers articles sur la durabilité de l’agriculture et de l’alimentation (fiscalité carbone, ferments du futur, marchés de gros).

Amandine Hourt, Centre d’études et de prospective

Lien : Iris

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