La biodisponibilité orale des bisphénols A et S chez le porcelet

Des membres de l’unité de recherche Toxalim et de l’École vétérinaire de Toulouse, en collaboration avec les universités de Montréal et de Londres, ont procédé à une étude expérimentale sur des porcelets afin de comparer le devenir, dans l’organisme, des bisphénols A (BPA) et S (BPS), présents dans les matériaux en contact avec les denrées alimentaires (MCDA). Ces dernières années, certains risques imputables au BPA ont conduit à l’interdire, et les industriels à le remplacer par des alternatives, dont le BPS. Or, l’article publié dans Environmental Health Perspectives rappelle que, chez la souris, des effets œstrogéniques du BPS avaient précédemment été mis en évidence in vitro et in vivo, ainsi que des effets inducteurs de tumeurs mammaires et de la lipogenèse dans les adipocytes.

Le porcelet a été choisi, compte tenu des similitudes de ses fonctions gastro-intestinales avec celles de l’homme. À partir des données obtenues suite à des administrations intraveineuses et orales de BPA et de BPS, l’objectif était de développer un modèle toxicocinétique pour en évaluer les éliminations plasmatique et rénale, ainsi que le métabolisme et la biodisponibilité orale. Des échantillons de sang veineux et des urines ont été prélevés avant et après les administrations, puis analysés.

D’après les données obtenues, lorsque le BPA et le BPS sont administrés à la même dose par voie orale, la quantité de BPS qui accède à la circulation sanguine est environ 100 fois supérieure à celle de BPA. De plus, le BPS n’est pas métabolisé dans les cellules intestinales, contrairement au BPA qui l’est à 44 %, et sa métabolisation hépatique est également moindre (41 % contre 99 %). La biodisponibilité orale du bisphénol S (57 %) est donc très supérieure à celle du bisphénol A (0,50 %). Au niveau de la circulation sanguine, les auteurs mettent en évidence une élimination plus lente du BPS, conduisant à des concentrations sanguines environ 250 fois supérieures à celles du BPA. Alors que le BPS possède des propriétés œstrogéniques comparables à celles du BPA, ces résultats montrent, chez l’animal, qu’il persiste plus longtemps dans l’organisme et à des concentrations beaucoup plus élevées que le BPA. Ainsi, pour l’Inra, ce résultat souligne l’importance essentielle de l’évaluation de l’exposition dans le cadre de la recherche d’alternatives à des substances préoccupantes, ce qui « pourrait permettre d’éviter une substitution regrettable ».

Madeleine Lesage, Centre d’études et de prospective

Sources : Environmental Health Perspectives, Inra

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