Mise en évidence d’une interdépendance entre intensification agricole et services de pollinisation au niveau national
Les travaux d’une équipe de chercheurs français révèlent l’existence, au niveau de la France métropolitaine, d’une interdépendance entre intensification agricole et services de pollinisation : une agriculture dite intensive permet d’augmenter les rendements des cultures qui ne dépendent pas ou peu des pollinisateurs, mais elle provoque des baisses significatives de rendements pour les cultures qui dépendent fortement des services de pollinisation par les insectes (abeilles, syrphes, coccinelles, papillons, etc.). Or, il a été estimé au niveau global qu’environ 35% des cultures destinées à l’alimentation humaine dépendaient des services de pollinisation.
L’étude s’est appuyée sur les données de rendements régionaux de 54 cultures pour la période 1989-2010. Le degré d’intensification agricole a été évalué au niveau régional via l’indicateur HVN (agriculture à haute valeur naturelle), reposant lui-même sur trois critères au niveau communal : la diversité des cultures, l’utilisation d’intrants et la présence d’éléments fixes du paysage.
Les résultats ont montré non seulement que les rendements moyens étaient liés au degré de dépendance des cultures aux services de pollinisation, mais également la variabilité de ces rendements. Ainsi, à l’inverse des cultures indépendantes des pollinisateurs, les rendements des cultures très dépendantes des services de pollinisation sont à la fois pénalisés et plus variables en agriculture intensive.
Les auteurs en concluent que l’intensification de l’agriculture ne permet pas toujours de maximiser la production agricole. Au sein du débat scientifique sur le land sharing vs. land sparing (une agriculture durable sur toute la surface vs. une agriculture intensive à côté de réserves naturelles), ce travail milite, pour les cultures dépendantes des pollinisateurs, pour le land sharing. Les chercheurs promeuvent ainsi le développement d’une agriculture assurant protection de la biodiversité et fourniture de services écosystémiques.
Cette étude va dans le même sens que celle menée par le Joint Research Centre au niveau européen l’an passé (cf. billet veille CEP novembre 2013) et fait écho à la conférence du 5 juin 2014 intitulée « Pour une agriculture respectueuse des pollinisateurs ».
Noémie Schaller, Centre d’études et de prospective