Scénarios pour l’agriculture biologique en Europe
Une étude publiée dans Food Policy présente l’analyse faite à l’horizon 2015 des marchés de produits issus de l’agriculture biologique en Europe. Quatre scénarios ont été construits. Ce travail est d’autant plus intéressant que peu d’études prospectives abordent la question de l’agriculture biologique.
La méthode utilisée consiste à établir des scénarios à « dire d’experts ».
Un premier scénario décrit une « croissance stable » de l’agriculture biologique, et s’avère très positif pour ce mode de production. Il implique un différentiel de prix entre produits bio et non bio qui se réduit petit à petit, un contexte économique global favorable (filière active, soutiens publics indirects via le développement rural, crise économique contenue, etc.), et des consommateurs soucieux de leur santé et qualité de vie.
Le scénario 2 est celui d’une « croissance impulsée par les politiques publiques ». Dans un contexte pourtant sombre de crise économique marquée par des prix du pétrole et de l’énergie élevés et des scandales sanitaires dans le domaine de l’alimentation, l’agriculture biologique tire son épingle du jeu grâce à des soutiens publics et à des coûts de production réduits par l’usage de technologies et techniques moins intensives en intrants. La croissance du secteur bio est faible mais stable.
Le scénario 3 relate une « industrialisation de l’agriculture » dans lequel les ventes de produits biologiques diminuent et la part de marché de l’agriculture bio se réduit jusqu’à devenir marginale. Le contexte économique est tendu, le revenu des ménages diminue et les politiques optent pour le « laissez-faire », avec des soutiens qui diminuent. Les incitations sont fortes en revanche pour produire des OGM, des biocarburants. Dans ce contexte, la production biologique se regroupe dans des zones pour éviter la « contamination », et les produits bio deviennent des biens de luxe.
Le scénario 4 s’intitule la « durabilité technique ». La crise fait place dès 2015 à une croissance faible mais positive, tirée par la technologie. Dans le domaine de l’agriculture et de l’alimentation, une acceptabilité plus grande des biotechnologies induit la production, entre autres, de produits considérés comme favorables pour l’environnement. Le budget de la PAC diminue globalement alors que le coût de l’alimentation devient mineur pour les consommateurs. L’agriculture biologique, moins rentable, devient un marché de niche (-de 5% de parts de marché).
La matrice des scénarios (cliquer pour agrandir)
Less forces motrices cruciales pour l’avenir du secteur bio sont donc considérées par les experts comme étant l’environnement politique et notamment les politiques de soutien au secteur. Par ordre d’importance, c’est ensuite la demande des consommateurs qui semble déterminer le marché du bio.
Thuriane Mahé, Centre d’études et de prospective