Enseignements de la filière d’huile de palme indonésienne pour le développement de celle du Ghana

Une équipe internationale de chercheurs a publié, en mai 2022 dans Land Use Policy, une analyse comparée des filières d’huile de palme au Ghana et en Indonésie. Si cette production en Asie du Sud-Est a fait l’objet de nombreux travaux, il n’en est pas de même pour l’Afrique de l’Ouest.

La culture du palmier à huile a été introduite en Indonésie au XIXe siècle à partir de semences africaines. Depuis les années 1980, elle a connu un fort développement grâce à la mise à disposition, via un système de concessions à des multinationales, de forêts appartenant à l’État pour être reconverties en plantations. Parallèlement, l’Indonésie a aidé l’installation de petits producteurs en facilitant l’accès à la terre, au crédit, aux intrants et en développant les infrastructures locales. Ces derniers ont été intégrés à la filière agro-industrielle grâce à des contrats souvent négociés par l’intermédiaire de coopératives. Le pays est ainsi devenu le premier producteur et exportateur mondial d’huile de palme, réduisant ainsi sa pauvreté. Des impacts négatifs sont en revanche à déplorer sur les communautés (accaparement de terres) et surtout l’environnement (déforestation, pollution liée à la sur-utilisation d’engrais et pesticides).

À l’inverse, l’huile de palme est une production traditionnelle en Afrique de l’Ouest, où de nombreux pays cherchent à reproduire la dynamique indonésienne. Au Ghana, ce sont surtout des petits producteurs qui transforment eux-mêmes, ou via une filière artisanale, leurs fruits. En raison d’une insécurité foncière et d’un accès réduit aux financements, l’intensification de la production reste limitée et les rendements nettement plus faibles qu’en Indonésie (- 60 %). Des plantations et une filière industrielle se sont installées, certains petits producteurs étant intégrés par le biais de contrats souvent déséquilibrés (faible pouvoir de négociation). Dans ces conditions, l’huile de palme est supplantée par le cacao, première culture de rente au Ghana. Plutôt que de transposer les politiques indonésiennes et, avec elles, leurs conséquences environnementales, les auteurs suggèrent de les adapter à l’existant : développer l’accès des petits producteurs aux intrants, aider à moderniser l’outil de transformation, rééquilibrer les relations entre producteurs et agro-industrie.

Muriel Mahé, Centre d’études et de prospective

Source : Land Use Policy

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