Incitations économiques au reboisement : quels impacts sur la biodiversité ?
Un article publié dans Ecological Economics, en juin 2024, évalue les effets sur la biodiversité d’incitations économiques au boisement de terres agricoles, en Écosse et en Angleterre. Il combine modélisations économique et écologique, pour estimer les conséquences de paiements incitatifs sur la répartition de trois espèces d’oiseaux.
L’étude révèle d’abord qu’une augmentation de la couverture forestière entraîne une hausse de la présence des espèces d’oiseaux dans les parcelles reboisées. Cependant, cette relation n’est pas linéaire et varie selon les espèces et les régions. Une corrélation positive est observée entre les rendements agricoles et le potentiel écologique des parcelles en Écosse : une politique de boisement optimale, du point de vue de la biodiversité, s’y ferait au détriment de la production agricole. À l’inverse, une corrélation négative est observée en Angleterre : les antagonismes entre les deux objectifs y seraient moins forts.
L’article s’intéresse ensuite à l’efficacité des paiements incitatifs et il estime le coût d’une augmentation de la probabilité de présence des espèces. Il met en évidence des rendements marginaux décroissants pour les actions de conservation. Par ailleurs, la conservation de certaines espèces est systématiquement plus rentable que d’autres (figure). Les auteurs soulignent que l’efficacité des paiements diffère entre les deux zones étudiées, en partie à cause de la répartition spatiale des avantages écologiques. Ainsi, une politique optimale ne devrait pas seulement être envisagée du point de vue des montants, mais prendre en compte l’hétérogénéité des conditions environnementales.
Évolution de la présence de trois espèces d’oiseaux dans différents scénarios d’incitation au reboisementSource : Ecological Economics
Lecture : nombre de parcelles occupées par trois espèce d’oiseaux, à savoir mésange à longue queue (bleu), grimpereau des bois (orange), bruant jaune (vert), en Écosse (haut) et en Angleterre (bas). Les abscisses correspondent au niveau de subventions au reboisement. Un paiement de 0 % correspond au coût d’opportunité du boisement estimé par les auteurs, un taux de 100 % correspond au double de ce montant.
L’étude présente certaines limites. En ce qui concerne les motivations des agriculteurs, le modèle ne prend pas en compte tous les facteurs pouvant influencer la décision de boisement, tels que les préférences pour les aménités environnementales. Par ailleurs, l’étude se concentre sur trois espèces et n’intègre pas les effets négatifs du reboisement sur certaines autres. Enfin, le modèle ne prend pas en considération les dynamiques écologiques à long terme.
Miguel Rivière, Centre d’études et de prospective
Source : Ecological Economics