Des variétés de riz génétiquement modifiées en réponse au changement climatique

Dans un article publié dans la revue New Phytologist, des chercheurs britanniques comparent la résilience de variétés de riz à plusieurs stress abiotiques : sécheresse, salinité, élévation de température, etc. Le riz fournit plus de 20 % des calories consommées dans le monde, mais cette culture est menacée dans certaines régions de plus en plus impactées par le changement climatique. Les auteurs comparent 72 variétés conventionnelles et deux variétés génétiquement modifiées. Les stress considérés peuvent en impacter la croissance et le rendement. L’analyse des réponses de ces variétés est faite à la lumière des caractéristiques (densité, taille, conductance, morphologie, etc.) de leurs stomates. Au niveau des feuilles, ces pores microscopiques régulent l’entrée du CO2 (pour la photosynthèse) ainsi que le processus de transpiration assurant le refroidissement de la plante et l’absorption par les racines de l’eau et des nutriments du sol.

Exposées à la sécheresse et la salinité, les variétés transgéniques présentent de meilleures résistance et récupération que les variétés conventionnelles (figure ci-dessous), grâce à leur très faible densité de stomates de taille moyenne. Ces caractéristiques stomatiques ne peuvent, selon les auteurs, se retrouver dans les variétés conventionnelles, dans lesquelles la densité et la taille sont corrélées négativement : plus leur densité est faible et plus grands sont les stomates. Aux stress provoqués par la température (plantes maintenues à une forte température ou soumises à des élévations subites), les variétés transgéniques ont également montré un dépérissement plus lent. Des lignées avec des stomates moins nombreux et plus gros devraient encore mieux résister aux températures élevées que les différentes variétés testées. À l’inverse, celles ayant un faible nombre de stomates de petite taille offriraient une meilleure réactivité face à des variations fréquentes de température.

Comparaison de la résilience de 11 variétés de riz (dont 2 transgéniques) au stress de la sécheresse, en fonction de leurs caractéristiques stomatiques
Source : New Phytologist
Lecture : une dizaine de plantes est étudiée pour chacune des 11 variétés. Les neuf variétés conventionnelles sélectionnées couvrent la gamme des traits stomatiques observés sur l’ensemble des 72 variétés. En vert figurent les variétés transgéniques nommées OsEPF1oe. La comparaison porte sur le niveau de stress en condition de sécheresse et sur la capacité de récupération. Trente jours après germination, les plantes ont été exposées à la sécheresse durant 5 jours (a) : plus le stress est élevé, plus l’indice PSII (photosystème II : complexe enzymatique intervenant dans les réactions de photosynthèse) est bas. Pour une même variété, l’indice moyen (triangle noir) est bien inférieur à celui de plantes normalement arrosées (losange noir). Le niveau de stress des plantes transgéniques est significativement plus faible. En b, l’ordonnée indique le nombre de nouvelles feuilles apparues 7 jours après la réhydratation des plantes. Il augmente avec la densité stomatique des variétés conventionnelles, hormis pour les 2 variétés transgéniques qui, avec une moyenne de 10,9 nouvelles feuilles par plante, récupèrent mieux de la sécheresse.

Au vu des résultats, il paraît peu probable de trouver une combinaison de caractéristiques stomatiques idéale face aux différents stress abiotiques. En revanche, ces caractéristiques peuvent être prises en compte pour sélectionner les variétés de riz à cultiver dans une région donnée, en fonction de ses spécificités climatiques. Enfin, selon les auteurs, l’édition génétique permettrait de créer des variétés aux traits optimisés, ne pouvant être obtenues par sélection variétale, les rendant plus résilientes à différentes conditions extrêmes.

Jérôme Lerbourg, Centre d’études et de prospective

Source : New Phytologist