Effet des équipements agricoles numériques sur les intentions d’achat des consommateurs

Les technologies numériques (assistance à la prise de décision agronomique, modulation automatisée de l’application des intrants, etc.) font partie des solutions pour relever différents défis de l’agriculture (productifs, environnementaux, économiques, etc.). Dans un article publié en novembre 2022 dans PLoS ONE, des chercheurs s’intéressent aux effets potentiels de la numérisation croissante des exploitations agricoles sur les intentions d’achat des denrées produites.

À partir d’une enquête auprès de 2 300 individus représentatifs de la population allemande âgée de 15 ans ou plus, les auteurs ont estimé un indicateur reflétant la volonté du répondant d’acheter le produit agricole (VRAP), selon les différentes exploitations présentées (taille, mode de production, niveau de digitalisation). Répartis aléatoirement auprès des enquêtés, les questionnaires différaient par l’explication donnée pour l’utilisation des outils numériques : aucune justification ; des avantages pour l’agriculteur et ses salariés (diminution de la charge de travail, du risque économique, etc.) ; des intérêts pour le consommateur (limitation des résidus de pesticides dans les aliments, transparence et traçabilité, etc.) ; des bénéfices environnementaux (réduction de la pollution, de la compaction des sols, etc.).

Les résultats confortent de précédentes études faisant état d’une plus grande confiance du consommateur envers des produits issus de l’agriculture biologique ou provenant d’une petite exploitation familiale. De plus, la volonté du consommateur d’acheter une denrée, qu’elle soit issue d’une exploitation professionnelle ou produite en agriculture conventionnelle, baisse sensiblement si l’agriculteur a recours aux technologies numériques. L’analyse selon le type d’argumentaire et le profil technophile ou technophobe du répondant éclaire ces résultats globaux (figure ci-dessous). Pour les enquêtés plutôt technophiles, l’intention d’acheter un produit agricole issu d’une grande exploitation ou de l’agriculture conventionnelle augmente avec le niveau de digitalisation, particulièrement lorsque l’argumentaire en présente les intérêts pour le consommateur. Au contraire, une digitalisation des équipements plus avancée se traduit par une moindre confiance de la part des répondants plutôt technophobes, sauf lorsque les bénéfices environnementaux sont mis en avant. Enfin, quelle que soit l’appétence de la personne pour les technologies, une argumentation détaillant leurs avantages pour les agriculteurs ou leurs salariés influence très peu les intentions d’achat déclarées.

Indicateur reflétant la volonté d’achat en fonction du niveau de digitalisation de l’exploitation agricole, de l’argumentaire associé et de l’attitude des répondants envers les technologiesSource : PLoS ONE
Lecture : les quatre figures se distinguent selon le type de justification donnée à la mise en place de technologies numériques dans l’exploitation : aucune (en haut à gauche), « altruiste » (bénéfique pour l’exploitant et les salariés ; en haut à droite), environnementale (en bas à gauche), « égoïste » (bénéfique pour le consommateur ; en bas à droite). Pour chacune, le score VRAP est calculé en fonction de la taille de l’exploitation et de son niveau de digitalisation. Les deux courbes présentent les scores selon l’attitude générale des répondants envers les technologies.

Jérôme Lerbourg, Centre d’études et de prospective

Source : PLoS ONE